Page de couverture de 3. La fabrique du récit

3. La fabrique du récit

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En Israël, l’éducation joue un rôle central dans la construction de l’identité nationale. Dès leur plus jeune âge, les élèves découvrent l’histoire juive et la Shoah comme piliers fondateurs, tandis que la Nakba - l'exode forcé des Palestiniens en 1948 - reste absente des manuels scolaires en hébreu. L’arabe, pourtant langue officielle jusqu’en 2018, est relégué à un statut secondaire et peu parlé. Cette vision partielle du passé et de la région façonne des générations qui se définissent avant tout par la mémoire juive et le récit sécuritaire. L’école devient ainsi un lieu clé où se transmettent les fractures de la société israélienne.

Dès leur plus jeune âge, les élèves apprennent l’histoire juive et la Shoah comme piliers fondateurs du pays. Mais un autre pan de l’histoire reste absent : la Nakba. L’exode forcé de centaines de milliers de Palestiniens en 1948 n’apparaît pas dans les manuels scolaires en hébreu.

Hasbara : la construction du récit national israélien

Hasbara, littéralement “explication” en hébreu, désigne la communication publique de l’État d’Israël visant à façonner son image et son récit historique. Elle prend forme dans les médias, la diplomatie, mais aussi dans le système éducatif.

Ainsi, la “paix de Galilée” fait référence à la guerre du Liban, et l’omission du nom propre “Palestine” participe à contrôler la narration, et éviter toute reconnaissance - même symbolique - d’une entité palestinienne officielle.

La hasbara israélienne, également connue sous le nom de propagande, est très efficace. Je ne suis pas en train de dire que c'est une bonne chose. Je pense au contraire qu'à long terme, c’est très mauvais pour Israël. Je pense qu’il est temps qu’Israël regarde de près ces problèmes et assume ses torts. — Yonatan Mendel, chef du département des études sur le Moyen-Orient à l’université Ben Gourion du Néguev à Beer-Sheva.

La langue arabe reléguée

Jusqu’en 2018, Israël comptait deux langues officielles : l’hébreu et l’arabe. Depuis la Loi État-nation, l’hébreu est devenu la seule et unique langue officielle.

Nous sommes actuellement face aux premières générations de l'histoire du peuple juif, où il n'y a pas de création littéraire en langue arabe. Génération après génération, les Juifs ont pourtant écrit en arabe ici ou dans d'autres pays du Moyen-Orient. — Yonatan Mendel.

Une mémoire sélective qui façonne les générations

Ce blocage linguistique se reflète également dans les programmes scolaires. La Nakba est absente, et les cartes ne représentent ni Gaza ni la Cisjordanie. Inversement, les manuels palestiniens sont scrutés par Israël, accusés “d’inciter à la haine”. Ces doubles discours pèsent sur la région et façonnent des générations entières autour de vérités partielles.

L’école devient ainsi le reflet des fractures profondes de la société israélienne : un lieu de transmission culturelle et historique, mais aussi d’exclusion, où la mémoire collective se façonne entre identité juive, sécurité nationale et récits officiels tronqués.

Avec :

Pr. Yonatan Mendel, chef du département des études sur le Moyen-Orient à l’université Ben Gourion du Néguev à Beer-Sheva.

Emmanuel Medioni, professeur d’Histoire dans un collège/lycée religieux de Jérusalem.

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