Page de couverture de Andrej Babis, le retour gagnant du «Donald Trump tchèque»

Andrej Babis, le retour gagnant du «Donald Trump tchèque»

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Plus de deux mois après sa victoire sans appel aux élections législatives avec 35% des voix pour son parti ANO, Andrej Babis a été nommé, ce mardi 9 décembre, Premier ministre de la République tchèque. Le milliardaire de 71 ans retrouve la direction du gouvernement après quatre années dans l’opposition, et un virage à droite toute pour cet admirateur déclaré de Donald Trump. C’est un « come-back » politique impressionnant : après avoir passé quatre ans dans les rangs de l’opposition et subi plusieurs enquêtes pour détournements de fonds, Andrej Babis est de nouveau nommé à la tête du gouvernement tchèque. Toute ressemblance avec Donald Trump est parfaitement assumée et même revendiquée par cet homme d’affaires septuagénaire qui a multiplié les références au président américain durant la campagne électorale. La première de ces références étant bien sûr son statut de milliardaire et d’entrepreneur, d’homme d’affaires « contraint » d’entrer en politique pour gérer l'État comme on gère une entreprise. « C'est l’un de ces entrepreneurs qui, à un moment donné, a considéré que son influence économique ne suffisait plus et qui décide de s’impliquer personnellement dans la vie politique, décrypte Jana Vargovcikova, maîtresse de conférences à l’Inalco. Il a créé son parti en 2011, le parti ANO… Les politistes parlent d’un parti-entreprise, c’est-à-dire qu’il ne faut pas imaginer des dynamiques internes, une implantation locale. C’est le chef qui a le dernier mot et qui constitue son équipe autour de lui, comme bon lui semble. » À lire aussiRépublique tchèque: le milliardaire Andrej Babis nommé au poste de Premier ministre Virage à droite La comparaison avec Donald Trump ne s’arrête pas là : comme le président américain, Andrej Babis a dirigé une première fois le pays, de 2017 à 2021, et a ensuite perdu les élections avant de triompher dans les urnes quatre ans plus tard. Et comme Donald Trump, il s’est radicalisé entre son premier et son deuxième mandat. Un virage vers la droite populiste qui n’avait rien d’évident. « N’oublions pas que, jusqu’aux élections européennes de 2024, son parti ANO était associé aux libéraux à Strasbourg, rappelle Jacques Rupnik, directeur de recherches à Sciences-Po Paris. Il a ensuite changé de casquette. C'est le cas de le dire puisqu’il arbore désormais la casquette rouge de Donald Trump. Au Parlement européen, son parti siège maintenant avec les Patriotes de Viktor Orban. Il y a donc un déplacement vers la droite populiste – sans en partager les excès, mais en jouant très clairement sur la fibre nationale-populiste. » Avec une inquiétude à la clé pour les partenaires européens de la République tchèque : Andrej Babis va-t-il jouer les trouble-fêtes à Bruxelles, à l’image de Viktor Orban, le dirigeant hongrois dont il se dit proche ? « On peut s’attendre raisonnablement à ce qu’il s’oppose aux politiques environnementales du Pacte Vert, et qu’il assume une position très conservatrice sur les politiques d’immigration et d'asile », pointe Jana Vargovcikova. « Sur la question du soutien à l’Ukraine en revanche, c’est plus flou. Il a promis de réduire le soutien de Prague à l’Ukraine durant la campagne électorale… mais l’incertitude demeure sur ce point et il n’est pas certain qu’il se mette aux côtés d’Orban pour créer des situations de blocage au moment de renouveler ou d’augmenter l’aide à Kiev. » Un pragmatique, pas un idéologue Accusé par ses adversaires politiques et par le Premier ministre sortant, le libéral Pietr Fiala, de vouloir éloigner Prague de son axe européen et occidental, Andrej Babis s’en défend. Dès le soir de sa victoire électorale, le 4 octobre dernier, il réaffirme sa volonté de maintenir l’ancrage européen et atlantiste de son pays et rejette fermement toute velléité de rapprochement avec Moscou. « De toute façon, il n’ira pas chercher la confrontation à Bruxelles parce qu’il est essentiellement pragmatique et qu’il n’a aucun intérêt, en tant qu’homme d’affaires, à s’éloigner de l'UE », souligne Jacques Rupnik. « Son entreprise agro-alimentaire opère dans plusieurs pays de l'Union européenne, dont l'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie, etc. Il sera un compagnon de route des Trumpistes européens, tels qu’ils se mettent en place avec le mouvement des Patriotes au Parlement européen. Mais ce n’est pas un idéologue, il n’a pas pour mission de sauver ou de détruire l’Europe. » Un premier test de ce « Babis bis » se jouera dès le 18 décembre à Bruxelles, où le milliardaire tchèque retrouvera les conciliabules du Conseil européen. À l’ordre du jour, notamment, le financement de l’aide à l’Ukraine par le biais des avoirs russes gelés. Un excellent révélateur des intentions, à l’international, du ...
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