Page de couverture de Hors-série – Entretien avec le Pr. Amos Goldberg

Hors-série – Entretien avec le Pr. Amos Goldberg

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Le Pr. Amos Goldberg, est historien, spécialiste de la Shoah et des génocides. Juif, Israélien, il est l’un des premiers (dès avril 2024) à avoir accusé son pays de commettre un génocide dans la bande de Gaza. Cet entretien a été réalisé en mai 2025. Depuis, plusieurs autres universitaires israéliens, ainsi que des ONG israéliennes, internationales, et une commission d'enquête de l'ONU, en sont venus à la même conclusion que lui. Mais en Israël sa voix reste minoritaire.

Historien reconnu de la Shoah et spécialiste des génocides à l’Université hébraïque de Jérusalem, le Pr. Amos Goldberg explore dans cet épisode spécial la manière dont Israël se pense et se raconte à travers la mémoire de l’Holocauste.

À travers son analyse, il met en lumière un paradoxe : cette mémoire, pourtant essentielle à l’identité israélienne, peut aussi devenir un obstacle à l’autocritique et à la reconnaissance de la souffrance palestinienne.

En avril 2024, Amos Goldberg fut l’un des premiers universitaires israéliens à accuser son propre pays de commettre un génocide à Gaza. Ses prises de position ont déclenché un débat intense au sein de la société israélienne et de la communauté scientifique internationale.

Dans cet entretien exclusif réalisé en mai 2025, il revient sur la puissance symbolique de la mémoire de la Shoah, et sur la façon dont elle influence encore aujourd’hui la politique israélienne et la perception du conflit israélo-palestinien.

Les Juifs israéliens ont tendance à penser qu'un génocide doit forcément ressembler à l'Holocauste. Et c'est la même famille de crimes. Mais ce qui se passe à Gaza, c'est complètement conforme à la définition de l'ONU dans la Convention pour la prévention du génocide de 1948. — Professeur Amos Goldberg

Comment Israël construit son propre récit ?

Pour Amos Goldberg, le récit national israélien s’est forgé autour d’une mémoire sélective : il estime que l’institution Yad Vashem, pilier de la mémoire de la Shoah, insiste sur la singularité de l’Holocauste, positionnant Israël comme la première victime de l’Histoire.

Cette logique, selon lui, empêche la reconnaissance d’autres tragédies, en particulier la Nakba, effacée du récit officiel et absente du système éducatif israélien.

Ainsi, l’État se raconte à travers une mémoire univoque, où le passé justifie souvent le présent.

Nous ne pensons qu'à nous-mêmes. On ne mentionne même pas d'autres génocides. Et quand vous regardez l'exposition, elle mentionne à peine les autres victimes de la Seconde Guerre mondiale, les victimes autres que les Juifs. — Pr. Amos Goldberg

Reconnaître une souffrance commune

Au cœur de sa réflexion, une question centrale : peut-on reconnaître la souffrance de l’autre sans renoncer à sa propre mémoire ?

Pour le Professeur Amos Goldberg, la hiérarchisation des douleurs – où le malheur juif devient suprême – freine toute possibilité de dialogue et nourrit une justification implicite de la guerre.

Il plaide pour un partenariat égalitaire entre Israéliens et Palestiniens, fondé sur la reconnaissance mutuelle et la justice partagée.

Cette société ne reconnaît pas le récit palestinien. Faire partie de cette société criminelle, nationaliste et chauviniste, c'est dévastateur parce que c'est dans votre famille, dans la société, c'est quand vous faites vos courses, c'est avec vos voisins, vos étudiants, c'est partout. Je crois en un partenariat égalitaire, un partenariat politique et civil égalitaire avec les Palestiniens. — Pr. Amos Goldberg

Une voix minoritaire, un débat essentiel

Alors que plusieurs ONG et chercheurs internationaux partagent désormais son analyse, la voix du Professeur Amos Goldberg demeure minoritaire en Israël.

Cet entretien offre un regard inédit sur la manière dont la mémoire du passé éclaire – ou obscurcit – la lecture du présent.

Entre responsabilité historique et regard critique, il interroge la place de la Shoah dans la conscience nationale et la difficulté d’un pays à se penser autrement que comme victime.

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