Épisodes

  • Le centre Akwaba-Mousso, un accueil bienveillant pour femmes maltraitées à Abidjan
    Dec 14 2025
    À Abidjan, depuis 2023, il existe un centre Akwaba-Mousso qui accueille avec bienveillance les femmes et les enfants qui sont victimes de maltraitance, de violences, d’agressions sexuelles. Un refuge pour des femmes désemparées, mais aussi un lieu où l’on apprend à se reconstruire, à repartir dans la vie avec confiance et détermination. Rediffusion du 9 juin 2025 C'est une des rares associations, peut-être même la seule de ce genre en Côte d'Ivoire, qui propose un centre d'accueil pour les femmes et leurs enfants victimes de violence, toutes formes de violences, au sein de la cellule familiale. Akwaba-Mousso : deux mots forts de signification pour Maureen Grisot, cofondatrice et directrice de l'association. « Cela veut dire "Bienvenue à la femme" dans deux des langues principales de la Côte d'Ivoire, en langue akan et malinké ». C'est lorsqu'elle était journaliste en Côte d'Ivoire que Maureen Grisot a constaté le dénuement dans lequel se trouvaient les femmes victimes de violences conjugales. Aussi, a-t-elle créé à Cocody avec d'autres associées ce centre qui prend soin des femmes maltraitées. Bienvenue à la femme « Il était fondamental de créer un centre dans lequel une femme ou un enfant qui a subi une violence peut trouver toutes les réponses dans un même endroit, gratuitement, sans avoir à affronter des jugements et des paroles malveillantes. Une fois qu'on a répondu à l'urgence liée à la violence, on s'est rendu compte que plus les femmes sont vulnérables économiquement, plus elles sont exposées aux violences ainsi que leurs enfants. Donc, il était fondamental d'avoir non seulement l'offre de juristes, d'assistants sociaux, de psychologues, de sages-femmes, mais aussi la mise en sécurité dans un foyer d'hébergement et de trouver des solutions pour qu'elles puissent sortir de ce foyer dans des conditions qui lui permettent de gérer sa famille comme elle l'entend et de ne plus retomber dans le cycle des violences. » Au centre d'accueil, il y a une crèche et aussi un atelier de couture pour aider à la réinsertion professionnelle. Cette femme, qui souhaite rester anonyme, se félicite d'y avoir appris un métier et d'avoir surtout raccommodé un peu de son amour-propre : « Oui, ce centre a été pour moi très bénéfique. C'est très utile parce que je me dis que ce que j'ai appris aujourd'hui, je n'allais pas pouvoir le faire en étant hors de ce centre. Je suis contente parce que moi qui n'avais pas d'importance aux yeux des autres, aujourd'hui, grâce à Akwaba-Mousso, je sais que je suis importante parce que j'arrive à montrer ce que j'ai acquis à d’autres femmes… ». Importante parce que je montre mes acquis à d'autres femmes Nana Sylla Coulibaly, experte comptable et membre du Women Investment Club, conseille et accompagne ces femmes dans leurs projets de s'émanciper économiquement en construisant leur avenir professionnel. « En fait, je suis très émue à chaque fois que je viens ici parce que je suis contente qu'elles ne soient pas réduites au fait qu'elles sont victimes de violences. Elle et moi, on n'a pas ce genre de discussion. On est vraiment très basé sur le business et ce sont des femmes qui ont des rêves, ce sont des femmes qui ont des compétences, ce sont des femmes qui ont envie de faire des choses et je leur apprends à vraiment se forger un mental d'entrepreneur pour vraiment passer à une étape supérieure de reconstruction. On a sélectionné quatre femmes parce qu'on en a eu un gentil bailleur, la fondation Vinci, qui a voulu mettre à disposition des fonds pour financer le lancement de leur business. Ce sont vraiment des personnes formidables, déjà, parce qu'elles ont mis aussi en place un "mentorat" pour ces dames-là et ensuite parce qu’elles sont très impliquées et tout ce qu'elles veulent, c'est vraiment voir ces dames-là s'en sortir. Et devenir autonomes ! ». Autre profil de femme secourue, cette quinquagénaire et son fils, battus par un mari violent, ont trouvé refuge à Akwaba-Mousso. « Vous savez, divorcer en Afrique ou quitter son foyer en Afrique, c'est comme si tu commettais un crime. Voilà, il n’y a personne qui veut te recevoir, c'est pour ça qu'on garde le silence. On subit… c'est pour ça qu'on subit jusqu'à ce que mort s'ensuive quelques fois. Donc, si je n'avais pas eu Akwaba-Mousso pour me soutenir, je serais encore là-bas ou bien peut-être déjà partie… » Au fil de la visite, Maureen Grisot rappelle la philosophie de son centre. « Il n'y a rien de linéaire en fait, il y a tellement de galères dans la vie. On est en Côte d'Ivoire, il n’y a pas de filet social. Donc, ce qu'on a compris aussi, c'est qu'on ne peut pas tout sauver, on ne peut pas tout changer. En revanche, nous, notre rôle, c'est de convaincre les femmes qu'elles peuvent avoir confiance en elles et de les aider à trouver leur voie, à trouver les moyens d'être ...
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  • Au Togo, les enseignants vont au devant des élèves handicapés
    Dec 7 2025

    Avec un programme d’éducation inclusif au Togo, l’ONG Handicap International réussit à démontrer que le handicap en milieu scolaire n’est pas une fatalité. Les formateurs éducatifs de l’ONG, en collaboration avec le ministère de l’Éducation, se donnent les moyens d’aller au devant des élèves et des familles pour que ces enfants puissent suivre une scolarité normale.

    Rediffusion du 4 mai 2025.

    Depuis trois ans, Handicap International a lancé dans la région des Savanes et de Kara dans le nord du Togo, un programme permettant aux jeunes handicapés de suivre une scolarité normale. Jusque-là, peu de moyens étaient mis à leur disposition, qu'ils soient sourds, aveugles ou déficients mentaux. Mais le premier obstacle à franchir était ailleurs : il s'agissait des parents qui souvent refusaient de scolariser leurs enfants par honte ou bien par manque de moyens.

    Un enfant qu'on cache

    « Le point de blocage premier, c'était vraiment le manque d'estime de soi, des enfants et jeunes handicapés et aussi des parents, explique Bénédicte Lare, responsable du programme. Pour eux, quand un enfant est handicapé, ce qu'il n’est bon à rien. Il ne peut pas être dans la communauté comme les autres. Il ne peut pas apprendre comme les autres et c'est un enfant qu'on cache. La pauvreté venait jouer aussi un rôle : le parent, quand il se retrouve avec deux ou trois enfants parmi lesquels il y a un enfant handicapé, va privilégier les enfants non handicapés parce qu’il est limité. Et le troisième critère, c'est qu'en fait, même si certains parents avaient la volonté d'envoyer leur enfant, les structures ordinaires et publiques n'étaient pas prêtes à accueillir les enfants handicapés, peu importe leur type de handicap ».

    L'approche globale du programme permet donc de convaincre parents comme enfants d'aller à l'école, mais surtout de former des encadrants itinérants qui se déplacent de classe en classe en soutien scolaire. Notamment dans les écoles des villages moins favorisés.

    « On fait un gros travail ici, dans la région des Savanes en matière d'éducation inclusive, pointe Yao Gbledjo, enseignant itinérant l'école primaire publique Bogou C dans cette zone venteuse des Savanes. D'abord, c'est grâce à eux (Handicap International, NDLR) que nous sommes devenus professeurs itinérants sur la base d'un concours. Nous étions déjà fonctionnaires sur le terrain quand ils ont lancé ce concours. On a participé, on a été retenus. Après ça, ils nous ont formés sur les différentes thématiques du handicap et après ils nous ont envoyés dans les écoles spécialisées pour des stages, pour pouvoir approfondir notre spécialité avec du matériel pédagogique adapté pour les écoles inclusives. Le même système de professeur itinérant existe aussi au niveau secondaire ».

    Professeur itinérant au niveau secondaire

    Non seulement ce programme forme les professeurs à la pédagogie liée au handicap, permet aux élèves de ne pas stagner à l'école, mais il redonne aussi à l'ensemble du groupe du lien. Un lien tissé par la scolarité. « Du coup, ce sont des enfants qui socialement sont épanouis, qui apprennent comme les autres, qui réussissent même mieux que les autres, confirme Bénédicte Lare. Kombena, par exemple, est toujours la première de sa classe depuis le primaire. Elle se fait respecter par les enfants non handicapés parce qu’elle maîtrise. Elle sait s’expliquer, elle sait répondre et elle sait motiver les autres à apprendre. La cohésion sociale est donc installée. Les parents des enfants handicapés sont aujourd'hui dans les réunions des associations des parents d'élèves. Il y en a qui prennent les responsabilités et qui ont leur mot à dire ».

    Kombena est non voyante. Cette élève de seconde fait partie de ceux qui se sentent valorisés par ces programmes adaptés. « Nos professeurs nous ont bien encadrés, explique-t-elle. Depuis le primaire jusqu'au collège, j’ai étudié l'anglais, la philosophie, l'allemand ».

    Depuis que ce programme scolaire d'intégration existe, il a formé plus d'une centaine de professeurs togolais à l'enseignement d'enfants handicapés dans quinze collèges et écoles primaires. Pas moins de 1 600 enfants handicapés ont ainsi pu suivre la même scolarité que leurs camarades de classe.

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  • La start-up sénégalaise Ecobuilders transforme des pneus recyclés en atout pour les agriculteurs
    Dec 1 2025
    Comment faire en sorte pour les paysans sénégalais de ne plus perdre une partie de leurs récoltes, faute d’entrepôts ou de silos ? Une jeune ingénieur, Marie Ndieguene, s'est posée la question à Dakar et a trouvé une solution simple au sein de sa start-up Ecobuilders. Une solution de conservation qui permet simultanément de ne plus gâcher les pommes de terres ou les oignons récoltés et en plus de recycler des produits qui jusque-là polluaient la nature. Vu de loin, c'est une case comme beaucoup d'autres à base d'argile et de torchis. Mais d'un peu plus près, on comprend qu'il s'agit d'une réserve de produits agricoles constitués de pneus recyclés, de plastique et d'un toit en roseau. Un système ventilé qui permet d'éviter la fermentation et donc le gâchis des récoltes d'oignons ou de pommes de terre au Sénégal. Une invention baptisée I3S pour « solutions innovantes d'espace de stockage ». Marie Ndieguene, ingénieure civile, a eu l'idée de créer cette solution lors d'un voyage d'étude dans la région de Kayar. « Quand je suis allée à Kayar, je suis passée devant un tas de pommes de terre, une montagne de pommes de terre pourries. Je leur ai demandé : "Qu'est-ce qui se passe ici ? Pourquoi ces pommes de terre sont amoncelées en tas ici ? Pourquoi elles sont pourries ?" Et ils m'ont expliqué qu'il n'y avait pas de dispositifs de conservation. Comme tout le monde produisait au même moment de la pomme de terre à cette époque-là, ils se sont retrouvés avec un tas d’invendus qui avaient pourri au soleil. Pour moi, résoudre cette problématique, c'était permettre au Sénégal d'atteindre cette autosuffisance alimentaire, mais aussi de rendre un pouvoir d'agir aux agriculteurs parce qu’ils produisent à perte. Voir sa récolte pourrir – plus d’un tiers de leurs récoltes pourrissent en raison de cette problématique-là – c'est catastrophique. C'était un non-sens de voir que nous avions virtuellement atteint l'autosuffisance alimentaire à travers les chiffres de la production, mais qu'en réalité seulement un tiers de notre production globale atteignait les consommateurs ». Autosuffisance et gâchis alimentaire Aussi, Marine Ndieguene, au sein de sa start-up Ecobuilders, a eu l'idée de récupérer des pneus usagés et des sacs plastiques qui jonchent le sol dans les champs au Sénégal pour construire des hangars de stockage ventilés pour les cultivateurs. « C'est un bâtiment en pneus et en matériaux recyclés qui a des murs et qui est circulaire. On s'est inspiré de l'architecture traditionnelle des cases. Les murs sont en matériaux recyclés à l'intérieur et à l'extérieur. Il y a une enveloppe thermique faite de terre. La toiture est isolée avec du thypha (une espèce de roseau, NDLR) et de la paille de typha. C'est un bâtiment qui a une capacité de 30 à 100 tonnes. Il est modulable et adaptable. Toute la structure est en matériaux recyclés ». Cette solution a permis au groupement de maraîchers, dont fait partie Cheikh Gueye, de sauver leur récolte de pommes de terre jusqu'ici conservées en tas sous des arbres et un peu de paille. « Tu as sauvé ma récolte » « Sur cent tonnes, au bout de quatre mois, on a perdu moins de 100 kilos, alors qu'avant, on pouvait perdre presque une tonne ou plus. Cela nous a vraiment permis de conserver nos produits jusqu'à avoir un meilleur prix sur le marché puisque les prix sur le marché varient d'un jour à l'autre, selon les propositions des commerçants. Ce hangar nous a permis de stocker en attendant un meilleur prix. Il nous a également permis d'être un peu indépendants et de pouvoir fixer notre propre prix ». Dans un contexte d’inflation galopante au Sénégal, Marine Ndieguene se félicite de l’amélioration pour les paysans. « Ma plus grande fierté, c'est d'avoir à ce jour aidé plus de 3 000 agriculteurs à travers le Sénégal, d'avoir pu sauver plus de 62 000 tonnes de pommes de terre, d'avoir créé 60 emplois directs et indirects et de recevoir chaque année au moment du stockage et du déstockage, les appels des producteurs qui me disent : "Tu as sauvé ma récolte. J'ai pu stocker pendant trois mois. J'ai pu stocker durant deux mois. J'ai pu vendre au bon prix parce que je n'étais pas obligé de brader". C'est pour moi une sensation inouïe de pouvoir mettre à profit mes compétences d'ingénieur au service de mon pays et surtout de l'agriculture. C'est toujours une grande fierté ». Le système de stockage imaginé par Marie profite aux pommes de terre et aux oignons, mais son projet est de décliner cette solution à d'autres productions comme celle de la mangue ou d'autres fruits.
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  • Phati, un petit clic pour trouver son médicament en pharmacie en RDC
    Nov 28 2025

    En RDC, si vous avez du mal à trouver vos médicaments dans une pharmacie, que vous craignez une rupture de stock ou que vous souhaitez pouvoir comparer les prix de tel ou tel traitement, Valorigo a une solution à vous proposer. Cette start-up fondée à Goma, il y a quatre ans, a mis au point l'application Phati, qui permet de trouver rapidement des médicaments et de les réserver à l'avance.

    C'est parce qu'il en avait assez de courir les rues de Goma pour trouver un médicament contre ses quintes de toux que Daniel Makombe, 28 ans, ingénieur informatique, a eu l'idée de mettre au point une application : Phati, sur ordinateur ou bien sur smartphone, permet de cartographier en direct les pharmacies qui disposent tout de suite du sirop, des pilules, du traitement dont vous avez besoin.

    « L'idée est née d'une expérience personnelle, se souvient le créateur de cette start-up congolaise. Chaque fois que j'avais besoin d'un médicament, il fallait que je puisse parcourir plusieurs pharmacies avant d'en trouver une qui en disposait. C'est vraiment stressant. Alors, je me suis dit qu'il y avait vraiment une opportunité pour digitaliser le secteur et résoudre ce grand challenge. On a commencé à Goma. Si vous cherchez par exemple du paracétamol, il suffit d'aller sur notre site et vous tapez le nom du médicament. Et le site va vous afficher toutes les pharmacies qui l'ont en stock, ainsi que le prix et l'adresse de ces pharmacies. Alors, vous n'avez qu'à cliquer sur "Réserver". Le système va vous générer un code de réservation que vous aurez à présenter dans la pharmacie afin d'être servi. Le paiement du médicament et la collecte, ça se passe en pharmacie. »

    Code de réservation et achat sur place

    De l'e-commerce pharmaceutique adapté aux réalités des stocks de médicaments de RDC. L'autre avantage de cette application Phati est de faciliter le travail des pharmaciens lors des inventaires, puisque les produits vendus sont scannés et donc déduits automatiquement des réserves, selon Daniel Makombe.

    « Il y a également des pharmacies qui sont d'ailleurs nos clients payants. Elles sont également très satisfaites parce que Phati leur permet non seulement d'attirer beaucoup plus de trafic dans leur pharmacie, mais surtout aussi de digitaliser les opérations quotidiennes. Et donc le suivi des stocks, celui des ventes et de la trésorerie. Tout cela se fait à travers cet outil », détaille-t-il.

    Après Goma et Beni, où la solution a été adoptée par 700 pharmacies, la start-up Valorigo, qui a conçu l'application, s'est installée au Katanga.

    Philippe Bassémé, chargé de la gestion-facturation à la pharmacie Horizon de Lubumbashi, est plutôt convaincu par cette solution digitale : « Cet outil permet de digitaliser toute notre gestion, notamment des stocks, la facturation. Autrefois, nous faisions tout dans un grand cahier avec un stylo. Mais depuis qu'ils sont arrivés, c'est trop rapide. L'inventaire est trop facile. »

    Inventaire trop facile

    La société de Daniel Makombe est née sur fonds propres, puis a vite reçu l'appui de la Fondation Bill et Melinda Gates, ainsi que celui du Fonds de soutien aux start-up Digital Africa, dont Sami Ajimi est l'un des responsables développement.

    « On s'est rendu compte qu'il répondait à une vraie problématique. En RDC, il y a énormément de pharmacies. Beaucoup sont même illégales. Et donc, Phati est parti du postulat de collaborer seulement avec les pharmaciens qui sont référencés par l'ordre national et de répondre à une problématique qui est assez chronique en RDC : celle de trouver des médicaments, et surtout à un prix abordable. Daniel nous expliquait que d'une pharmacie à l'autre, un médicament peut valoir deux fois plus cher », explique-t-il.

    Après Goma, Beni et – depuis quelques semaines – Lubumbashi, le prochain but de cette start-up congolaise sera de s'implanter sur le marché des pharmacies à Kinshasa.

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  • La Semaine de l'Afrique des Solutions
    Nov 12 2025
    Les 24 et 25 octobre 2025 s’est tenue à Paris la « Semaine de l’Afrique des Solutions ». Troisième rendez-vous du genre en trois ans qui est une sorte de laboratoire d’idées et de projets concrets mis en œuvre en Afrique. La SAS, c’est une semaine résolument optimiste faite de tables rondes, d’exposants, de débats et de pitchs de jeunes entrepreneurs africains ou de la diaspora en France qui veulent voir le continent sous un autre jour. Dans la salle de gala de la mairie du 16ᵉ arrondissement de Paris, on discute - non pas des problèmes de l'Afrique - mais plutôt d'une Afrique des solutions. 48 h de réunions, d'entretiens, d'exposants et de débats pour cette troisième édition de la Semaine de l'Afrique des solutions. Il s’agit d’une assemblée de porteurs de projets pour un continent qui se veut résolument optimiste, mis en avant par des journalistes comme Léonce Houngbadji, journaliste béninois. Il est également l'organisateur de ces rencontres. « Nous sommes partis d'un constat simple qui est qu’il y a beaucoup de plateformes autour des problématiques sur l'Afrique. Chaque jour, il y a une conférence, un sommet, un colloque, un salon sur l'Afrique. Et la plupart du temps, quand vous avez la possibilité de participer à ce genre d'événements, vous allez constater qu'on ne parle que de problèmes. Comme si en Afrique, il n'y a que des défis, il n'y avait que des problèmes. C'est vrai qu'on a des défis en Afrique, il faut le reconnaître, mais pas que... À côté des problèmes, il y a aussi des choses qui marchent en Afrique. Vous avez aujourd'hui des Africains qui créent des drones agricoles, des mallettes médicales, des bornes de télémédecine, des voitures à hydrogène, des objets connectés. Il y a énormément de solutions qui sont de plus en plus développées par des Africains qui apportent des réponses concrètes et concluantes à certaines de nos problématiques sociales, sociétales, écologiques et autres. Mais on n'en parle pas ou on en parle très peu. Et nous, avons décidé d'utiliser le "journalisme de solution" pour raconter l'Afrique autrement, pour faire émerger de nouveaux récits positifs et inspirants qui donnent à voir une autre Afrique. Pour dire : "Oui, il y a des problèmes, mais il faut aller au-delà de ces problèmes-là" », explique Léonce Houngbadji. Aller au-delà des problèmes Loin de toute candeur ou naïveté, Youssouf Camara, directeur de la Maison de l'Afrique, présent à ces rencontres, estime que cette volonté de présenter le continent sous un jour positif est pertinente. « Non seulement c'est pertinent, mais je pense que c'est indispensable. Parce que cette Afrique qui est racontée à travers ses problèmes, masque une Afrique qui avance, qui a malgré tout des solutions à des situations auxquelles sont confrontées les populations. Et ces situations-là ne sont pas connues. Donc, une Semaine comme celle-ci permet d'agréger un certain nombre de solutions. Ici, on va voir défiler sur 48 h plus d'une centaine de solutions concrètes. À partir du numérique, de la santé, du financement... Donc, il est important que les Africaines et les Africains entendent que dans ce continent, il y a des solutions réelles qui sont mises en place et qui fonctionnent. Ces diasporas sont un peu éparses, donc c'est bien qu'elles puissent se réunir pour regarder ce qu'elles peuvent faire ensemble et être ce pilier qui, au-delà des fonds qu'elles envoient en Afrique, amène également des solutions concrètes pour se mettre en œuvre », précise Youssouf Camara. La diaspora africaine a toute sa part à jouer dans une Afrique des solutions. C'est ainsi que Peggy Boédé, aide-soignante ivoirienne dans différents hôpitaux parisiens, a décidé de mettre à profit son expérience en créant Kéa Stérilisation, une société spécialisée dans la stérilisation des instruments chirurgicaux. « J'ai décidé de créer mon entreprise, il y a bientôt cinq ans, parce qu'un membre de ma famille a contracté une infection nosocomiale, ici, aux urgences, dans un hôpital français, à cause d’un instrument mal stérilisé. Donc, Kéa Stérilisation collabore aujourd'hui avec l'Institut de cardiologie d'Abidjan à Treichville. Nous les accompagnons à mettre aux normes leur service stérilisation parce qu'il y a plusieurs établissements en Afrique qui n'ont pas de laveurs. Ils lavent à la bassine, ils lavent à la main. Donc, mon entreprise est là pour les équiper, leur fournir des laveurs, des désinfecteurs, des autoclaves... Donc, cet événement de la Semaine de l'Afrique des Solutions, c'est un relais pour nous », raconte Peggy Boédé. Et en termes de relais, les organisateurs de cette semaine de l'Afrique des solutions comptent créer prochainement un annuaire des innovateurs africains, un site valorisant les solutions « made in Africa » et mettre en place une école de journalisme de...
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  • À Abidjan, le Masa Lab' pépinière à jeunes talents
    Nov 9 2025
    L’Afrique en marche à Abidjan où depuis six mois des artistes de différents domaines (musique, théâtre, danse) travaillent dur dans le cadre du Masa Lab’. Le Marché des Arts du Spectacle d'Abidjan - en dehors de son rendez-vous biannuel - a mis en place un incubateur permettant à cinq artistes de se perfectionner dans leur art et surtout de se professionnaliser pour mieux gérer leur carrière… Rediffusion du 27 avril 2025. Derrière la porte du Yelam’s, une salle de concert au quartier Treicheville, répètent la chanteuse Ablaa et ses trois musiciens. Tous sont là pour un travail de résidence afin de se perfectionner sur scène. Jeune révélation baoulé de la musique ivoirienne, Reine Ablaa s'est fait connaitre par les réseaux sociaux. Pas spécialement de formation musicale à la base, d'où l'importance pour elle de travailler avec cet incubateur, le Masa Lab’ avec un coach expérimenté, le chanteur camerounais Blik Bassi. « On nous "incube" pendant un an, on a droit à des jours de répétition pour venir travailler sur le spectacle. On apprécie le fait d'apprendre de professionnels, de mentors, le fait d'apprendre même de ces musiciens et de recevoir aussi des formations qui sont faites au Masa Lab’ où des gens viennent nous former sur des thèmes de l'industrie, comme la façon de lire et signer un contrat. Comment développer sa carrière musicale ? Quelles sont les différents enjeux pour chaque artiste en fonction de si vous travaillez en label, si vous travaillez avec des majors. On vous fait comprendre en fait l'industrie. Une vision 360 degrés et c'est ce qui est très intéressant aussi », se félicite ce jeune espoir de la musique ivoirienne. Une vision artistique à 360° Un apprentissage, un outillage adapté qu’a conçu Abou Kamaté, le directeur général du Masa. Il est à l'origine de ce projet d'incubation des artistes ivoiriens. « Notre constat est que les artistes ont encore besoin d'un accompagnement pour mieux se structurer, pour mieux se professionnaliser et être en capacité de proposer des produits qui peuvent se jouer localement, mais aussi sur le marché international. Et donc le Masa Lab’, c'est un projet qui accompagne certes les artistes, mais aussi tous les métiers qui gravitent autour de la création artistique. Nous "incubons" certains artistes, mais aussi le manager, le chargé administratif, le chargé de communication. Il faut vraiment travailler sur cette question de professionnalisation, sur cette question de structuration, parce que c'est un business et il faut que les artistes puissent vivre de leur art pour cela. Ils ne peuvent pas juste compter sur leur talent, ils doivent aussi être de vrais entrepreneurs et c'est ça l'ambition du Masa Lab’ ». Ils ne peuvent pas juste compter sur leur talent Dans une autre salle de théâtre à Abidjan, Souleymane Sow, metteur en scène, répète et peaufine une pièce d'Edouard Elvis Bvouma, Une poupée barbue avec la comédienne Oga Kamouni. « Kamouni, affirme Souleymane Sow, c'est une comédienne qui est à l'écoute. Elle sort d'une école de théâtre. Je pense qu'elle a tout ce qu'il y a comme élément qu'une comédienne doit avoir. Je pense que dans le cadre de ce travail-là, on a un texte qui a une résonance. Donc à partir de cette résonance, on essaie de vraiment travailler. Les différents souffles, les différentes prononciations, donc on est vraiment dans un travail de recherche. Sur des matériaux, au niveau du plateau, en termes de corps, au niveau des tons, des voix et tout ça, on travaille aussi les différentes ponctuations qui sont dans le texte ». À l’écoute à ses côtés, Oga Kamouni, jeune comédienne sortie de l’Insaac mesure sa chance d’être intégrée au Masa Lab’. « Disons que le Masa Lab', c'est une belle occasion qui est faite aux artistes. C'est une opportunité pour nous de montrer nos talents et puis surtout de faire la rencontre de grands professionnels. Par exemple, Monsieur Sow, c'est un grand metteur en scène ici qu'on connaît très bien. Tout le monde rêve de travailler avec lui. Tout ce que je n'arrive pas à travailler, je parviens à le faire avec lui. Et c'est aussi une belle rencontre avec d'autres professionnels qui viennent d'ailleurs ». Au terme de ce mentorat artistique en danse, en musique et en théâtre, les artistes encadrés du Masa Lab’ joueront face au public lors du prochain Masa en 2026.
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  • En Mauritanie, la réhabilitation des systèmes d'eau coule de source entre Kiffa et Montpellier
    Oct 19 2025
    Lorsque deux villes de l’hémisphère nord et de l’hémisphère sud travaillent ensemble, cela donne des résultats pour le bien-être des populations. En l’occurrence, la métropole de Montpellier, dans le sud de la France, participe à un programme de réhabilitation du système de fourniture en eau potable de la ville de Kiffa, dans le sud de la Mauritanie. La problématique de l’eau, à des degrés différents, est commune aux deux villes. Et ensemble, elles trouvent financements et solutions techniques. La subvention Ficol (Facilité de financement des collectivités territoriales) est une sorte de jumelage technico-financier entre deux villes qui ont l'une des problèmes et l'autre des solutions. En l'occurrence, le maire de Kiffa en Mauritanie, Jemal Keboud, se doit de fournir à ses 80 000 habitants de l'eau potable. 22 000 d'entre eux, en périphérie de cette ville du sud mauritanien, n'ont accès qu'à des bornes-fontaines disposées dans les quartiers les plus reculés. Des points d'eau qui ont besoin d'être réhabilités ou pour certains même construits. « Chaque individu, qu'il soit en Mauritanie ou à Nouakchott, a besoin d'eau au quotidien. L'eau est vitale. Mon but, en tant que maire, en tant qu'élu, est de donner l'eau à mes citoyens sept jours sur sept. Et le projet a déjà réhabilité cinq fontaines qui sont fonctionnelles depuis une année presque et cinq autres sont encore en cours de réhabilitation. Et on envisage de réhabiliter d'autres et même d'installer de nouvelles bornes-fontaines avec l'appui de la métropole. Vraiment, ça a énormément changé le visage des quartiers qui abritent ces bornes-fontaines », précise Jemal Keboud rencontré à Montpellier lors de la Biennale Euro-Africa. À lire aussiMauritanie : la capitale Nouakchott connait une pénurie d'eau qui se vend à prix d'or « Des projets qui rendent collectivement fiers les citoyens français » Ces constructions ou réhabilitations des bornes-fontaines coûtent 1 600 000 euros. Un projet financé pour plus de la moitié par l'Agence française de développement dans le cadre de cette subvention Ficol, Romain Régulaire, responsable de la division Territoire et Entreprise à l'AFD : « Nous fonctionnons sur la base d'un appel à idées qu'on publie une fois par an, et on invite toutes les collectivités territoriales françaises à soumettre des projets de coopération décentralisée sur tous les secteurs possibles. Le seul critère étant que la collectivité puisse apporter une solution de financement de 20%. Notre instrument finance maximum 80% du plan de financement du projet. Et puis, il faut trouver un partenaire collectivités territoriales d'un des pays d'intervention de l'AFD, mais tous les secteurs sont concernés et toutes les géographies d'intervention de l'AFD peuvent en bénéficier. Ça participe aussi au rayonnement international de nos collectivités. Ça participe aussi à la diffusion de l'expertise française qui existe dans nos territoires. Et je crois que ce sont des projets qui rendent collectivement fiers les citoyens français qui sont véritablement acteurs de ces projets de solidarité internationale. » Une coopération avec « beaucoup de réciprocité » Fière de ce projet en cours, Clare Hart est la vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole en charge de la coopération avec la ville de Kiffa. L'envoi de techniciens et d'ingénieurs montpelliérains en Mauritanie devrait permettre d'augmenter la fourniture en eau de plus de 3 000 m3 par jour : « Il y a beaucoup de réciprocité dans ces projets et on apprend comment fonctionner dans une situation où on est en pénurie. On est dans la Méditerranée, nous sommes un spot méditerranéen, on est de plus en plus en constriction et donc on apprend beaucoup de nos partenaires au sud pour justement mettre en place des dispositifs ici. Et là, sur Kiffa, on travaille sur une situation très spécifique à cette zone-là. C'est la fameuse corvée d'eau. C'est ce qui empêche les femmes de pouvoir envoyer leurs filles à l'école. Donc, c'est un vrai sujet, un immense sujet sur l'égalité et le développement de la gent féminine sur ces zones-là, puisqu'si on ne peut pas aller à l'école, on est destiné à rester sur ces besoins purement manuels. Donc, on partage ça et la coopération et la solidarité internationale, c'est la réciprocité. » À l'heure actuelle, les Kiffistes, les habitants de Kiffa, n'ont accès que deux jours sur six à une eau de bonne qualité. Une fois ce projet abouti, on passera à quatre jours sur six. Le but étant un accès constant à l'eau. Pour cela, il faut finaliser un autre projet, se raccorder à l'eau du fleuve Sénégal.
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  • Coumba et Sabou luttent pour l'environnement au Mali
    Oct 12 2025
    Au Mali, face à la pollution et l’invasion de déchets plastique, Sabou Doumbia et Coumba Diakite, deux jeunes entrepreneuses maliennes, se retroussent les manches en transformant et en valorisant ces déchets. L’une crée des meubles, l’autre fabrique des ustensiles. Le recyclage au Mali, ça marche. Rediffusion du 30 mars 2025. Face à la pollution plastique, Coumba Diakité, fondatrice de l'entreprise By'Recycl et Sabou Doumbia, responsable de la société EcoBuild Mali, ont décidé de se retrousser les manches. Ces deux jeunes entrepreneuses à Bamako, au Mali, ont décidé de récupérer des sachets noirs qui jonchent le sol ou des pneus usagés jetés dans les caniveaux et d'en faire des objets recyclés, des objets de valeur. Au sein de son entreprise By'Recycl, Coumba Diakité transforme depuis 2018 des roues usées en caoutchouc en meubles élégamment décorés avec du wax ou bien du bogolan. « Je me suis tournée vers le recyclage parce que j'aime beaucoup découvrir de nouvelles choses. J'ai fait une formation sur les enjeux de développement durable. Du coup, après cette formation, ça m'a donné envie de me tourner vers le recyclage. Nous revalorisons les pneus usagés, nous faisons de mobilier avec : des chaises d'intérieur et d'extérieur, des poufs, des tables bases, des jouets pour les espaces de jeu pour les enfants », détaille-t-elle. À peu près 300 pneus recyclés par an, un chiffre qui peut paraître modeste au regard des déchets produits au Mali, mais Coumba organise également des ateliers de formation pour les femmes sans activité qui transforment des sachets plastiques. « Ce sont des activités de tissage des sachets plastiques pour faire soit des sacs de courses ou des objets de décoration. Cela permet à ces femmes de pouvoir faire des produits qu'elles peuvent vendre. Et on a déjà eu à former les femmes de deux camps de déplacés », selon elle. Sabou Doumbia, elle, participe souvent avec Coumba, à ces ateliers de sensibilisation et de formation sur le recyclage des déchets. Il y a trois ans, Sabou Doumbia a créé une société EcoBuild qui recycle jusqu'à 14 tonnes de plastique par an. « EcoBuild est née pour cette mission et, aujourd'hui, nous avons pour vision vraiment de promouvoir l'économie circulaire à travers le recyclage des déchets plastiques. Surtout proposer des solutions et des matériaux utiles pour la population à des coûts vraiment raisonnables », explique-t-elle. « Aujourd'hui, de plus en plus de jeunes commencent à prendre acte de l'impact de ces sachets classiques sur l'environnement, estime-t-elle. Je dirais qu'il y a une amélioration parce qu'il y a une prise de conscience, aussi minime soit-elle, qui est en train de se produire actuellement à Bamako. Avec Coumba, on a eu à collaborer sur différents projets avec cet objectif d'impact social et environnemental. Appuyer sur la responsabilité sociale de la population vis-à-vis de ces déchets plastiques et de les sensibiliser aussi à acheter les produits recyclés qui sont peu connus, ici, sur le marché. » Un travail de recyclage et de sensibilisation des populations à la question environnementale qu’accompagne Georges Théodore Dougnon avec son ONG Cultural Survival. « Lorsque j'ai connu Coumba, je pense que c'est la première dame que j'ai vue en train de transformer les pneus par exemple. C'était extraordinaire et c'est important parce qu'on a tendance à voir peu de femmes dans ce domaine-là. J’apprécie également le niveau de créativité et d'innovation qu'elles mettent dans leur travail. Je pense que c'est bien de voir des gens qui sont là pour faire de la récupération et de la transformation. Je pense que c'est bénéfique et que cela inspire aussi d'autres personnes », affirme-t-il. Sabou et Coumba commencent à mesurer l'efficacité de leur travail de recyclage. Prochaine étape pour Coumba Diakite : mettre au point un procédé de transformation des pneus usagés en granules pour fabriquer des sols souples. À lire aussiÀ la Une: des nouvelles taxes qui font débat au Mali
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