Épisodes

  • La question musicale et électro de Sudan Archives avec «The BPM»
    Dec 16 2025

    Ambiance club avec l'artiste américaine Brittney Parks, connue sous le nom de Sudan Archives. Elle est actuellement en tournée américaine pour présenter son troisième album The BPM.

    Le titre de ce troisième album est presque un manifeste. « BPM » comme « battement par minute », c'est l'unité de mesure utilisée pour exprimer le tempo de la musique ou le rythme cardiaque, quantifié par le nombre de battements se produisant en une minute.

    Brittney Parks joue avec les rythmes et les styles sur cet album. Après avoir exploré sa féminité noire sur son premier album (Athena en 2019) puis revisité son adolescence sur son deuxième opus (Natural Brown Prom Queen), l'artiste multifacette poursuit sa quête musicale, elle qui est devenue une sensation de la pop indépendante en 2017 avec le titre. devenu un tube « Come Meh way »

    En 2017, Brittney Parks, alias Sudan Archives, n'a que 23 ans mais fait déjà montre d'une singularité, avec ce métissage r'n'b, soul, électro et afropop. On y entend aussi un violon électrifié, car c'est la marque de fabrique de cette musicienne autodidacte qui a commencé son apprentissage dans l'orchestre de son église à Cincinnati dans l'Ohio.

    On l'entend jouer de l'instrument sur plusieurs titres, et on peut y déceler les influences de la musique folk irlandaise, comme sur le titre « She's got pain ». Elle ne se sépare pas de son violon. On la voit en jouer sur ses clips et sur scène, mêlant donc ses influences pop avec la technologie.

    Brittney Parks a travaillé son instrument en autodidacte puis a étudié l'ethnomusicologie à l'université de Pasadena. C'est parce qu'elle s'intéressait à ses racines africaines que sa mère l'avait surnommée « Sudan », d'où ce nom de scène. Elle a aussi, à ses débuts, confié avoir été inspirée par nombre de musiciens africains, et notamment le Camerounais Francis Bebey et le violoniste soudanais Asim Gorashi.

    Sur ce nouvel album The BPM, elle explore effectivement deux autres sources d'inspiration, la musique électronique : la house de Chicago et la techno de Detroit, les deux villes dont sont originaires ses parents.

    Cela s'entend particulièrement sur le titre « A bug's life ».

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    6 min
  • «Presque Punk» de P.R2B: de la fatigue générale à l'énergie collective
    Dec 15 2025

    Quatre ans après Rayons Gamma, la chanteuse française P.R2B revient avec un deuxième album intitulé Presque Punk. Un disque à la croisée de la fête et de l’émotion, où elle explore les thèmes du burn-out, du stress et de la violence du monde du travail.

    P.R2B a composé cet album seule dans les Cévennes, au sud de la France. Installée dans un hameau entouré de montagnes, elle s'y est reconnectée à la nature comme à son propre corps. Mais ses amis venus la visiter, eux, lui confiaient leur perte de sens dans leur vie professionnelle, les journées passées assis devant un écran, l’épuisement du quotidien au bureau. Dans Presque Punk, la main qui pianote sur un clavier d'ordinateur devient alors celle qui joue du piano.

    Un désordre joyeux

    L'album navigue entre techno spectaculaire, piano-voix dénudés, guitare et une énergie club à la fois dramatique et burlesque, qui s'est imposée au fil du processus. P.R2B raconte : « Il y avait déjà beaucoup de voix chorales, de questions réponses, d'éléments samplés : des bruits de films, des cris, des sons métalliques. Tout était déjà là dans les maquettes. Et, ensuite finalement, il y a aussi eu le corps : j'avais vraiment envie que ça s'incarne dans la danse, comme une catharsis, pour sortir et se libérer. C’est vraiment en travaillant les arrangements, avec le beatmaker Rosalie du 38, qu’on a cherché ensemble à détruire certaines formes des sons de voix, il la passait dans des effets. Dans l'idée, Presque Punk, il y avait aussi cette envie que quelqu'un vienne un peu détruire ce que j'avais fait, pour le transcender et créer une forme de désordre joyeux. »

    Le morceau éponyme, « Presque Punk », est un hymne aux angoisses contemporaines : réchauffement climatique, réseaux sociaux, montée de la violence. Mais l'album ne se contente pas de lister les maux de notre époque. Il nous embarque dans un véritable parcours émotionnel : d’une voix prophétique murmurée au tout début, tout se dérègle, on traverse tristesse et colère avant de s’ouvrir à la joie et à l’espoir.

    La voix au centre

    Côté chant, P.R2B s'inspire des comédies musicales de Jacques Demy mises en musique par Michel Legrand. Sa voix est très droite, sans aucun vibrato, et place les textes au centre. Elle a énormément travaillé la texture des différents enregistrements de voix.

    « J'ai enregistré quasiment toutes les voix toute seule, pour avoir la liberté de choisir le bon moment. Par exemple, j’ai enregistré « Bizarre » très tôt le matin. Parce que c’est une chanson d’amour très simple, et qu’au réveil, quand la journée n’a pas encore commencé, la voix est encore fragile. À l’inverse, pour « Spoil », où je mime les voix des gens qui nous racontent toute notre vie, il fallait que j'aie vécu la journée, voire que je sois fatiguée, pour pouvoir incarner ces différentes voix. Tout le travail a été de raconter quelque chose non seulement par le sens et les mots, mais aussi par la texture même de la voix » explique-t-elle.

    Presque Punk est un album est à la fois festif et intimiste, d'une liberté contagieuse. Face au monde qui vacille, il invite à reprendre le pouvoir en dansant, et à faire de la non-violence un nouveau geste de colère et de résistance. Une nouvelle manière d’être punk aujourd’hui, dans notre monde violent.

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    7 min
  • Liz McComb célèbre Noël en gospel et soul à Paris avec «Christmas & Black Nativity»
    Dec 12 2025

    Plus d’une douzaine d’albums, une carrière hors norme et une énergie intacte. À 73 ans, la chanteuse, pianiste et compositrice afro-américaine Liz McComb fait escale à Paris le 13 décembre 2025 pour célébrer Noël en musique avec son programme Christmas & Black Nativity au Palais des Congrès.

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    7 min
  • «Lodèr la Vi» de Saodaj: comment transformer l’épreuve du deuil en un acte artistique
    Dec 11 2025

    Le groupe réunionnais Saodaj propose avec Lodèr la Vi un nouvel album chargé de sens. Ce titre en créole signifie « Le parfum de la vie » et fait écho à un drame récent : la disparition, en 2024, d’un jeune membre du groupe. L’album s’inscrit ainsi comme un hommage musical et un moyen d’exorciser le chagrin collectif.

    Depuis près de quatorze ans, Saodaj fait rayonner le maloya, musique traditionnelle de La Réunion, sur toutes les grandes scènes internationales. Le binôme fondateur, Marie Lanfroy (chant) et Jonathan Itema (percussions), façonne les paroles et la musique autour du créole réunionnais, une langue vivante et expressive. Le maloya revisité par Saodaj se distingue par ses arrangements audacieux et son ancrage dans la culture créole.

    La langue créole, omniprésente dans cet album, est célébrée pour sa musicalité et la force de ses mots. Comme le souligne Marie Lanfroy, le créole est une « langue qui chante ». « Sur les scènes nationales ou internationales, les gens ne comprennent pas forcément. Donc, on prend le temps entre les morceaux d'expliquer de quoi ça parle. Dans les disques que l'on fait, on met toujours les traductions, en français, en anglais, pour que les gens puissent s'approprier le message. »

    Les textes de Lodèr la Vi portent ainsi l’émotion et la mémoire, tout en affirmant la singularité de la culture réunionnaise. Avec ce nouvel opus, Saodaj transforme l’épreuve du deuil en un acte artistique universel, qui touche autant par sa sincérité que par l’énergie du maloya. Lodèr la Vi se découvre comme un album hommage, porteur d’une tradition vivante et d’un désir de transmission.

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  • Obongjayar, l'artiste nigérian qui revendique une musique «post afro» sans contraintes
    Dec 10 2025

    Quelque part entre l'afrobeat, le rock, la pop et le hip-hop, à l'intersection entre son Nigeria natal et la scène musicale britannique : voilà où se situe Obongjayar, l'artiste nigérian, propulsé sous les feux des projecteurs depuis sa collaboration avec Fred Again. Sur le titre « Adore U », faisait partie des quelque 70 artistes invités à l'édition 2025 des TransMusicales de Rennes. Rencontre.

    Dans la vie, Obongjayar est comme sur scène et en studio : plein d'énergie, débordant d'idées et de métaphores de son cru. L'artiste nigérian d'une trentaine d'années n'hésite ainsi pas à comparer sa musique à un velouté « Pour faire une bonne soupe, saine et nutritive, il faut plein d'ingrédients. Ma musique, c'est pareil. »

    Et d'ingrédients, sa musique en foisonne : de son EP Which Way is Forward (2020) à son récent album Paradise Now (2025), les influences se croisent et se rencontrent, et les lignes se brouillent un peu plus à chaque projet. Les inspirations afrobeat sont évidentes (« je suis nigérian, africain, ce sont mes racines »), mais elles se mêlent aussi de sonorités soul, funk, hip hop ou rock. Et sa voix, tantôt falsetto surprenant, tantôt grave et rocailleuse, évolue au gré des sonorités de ses morceaux. « Ma musique, c'est un mélange entre là d'où je viens, et tout ce à quoi j'ai été exposé ensuite », explique le chanteur sans chichis ni fioritures.

    Le Nigeria, et tout le reste

    Car derrière Obongjayar, il y a surtout Steven Umoh, un trentenaire qui a vécu à Calabar, dans le sud du Nigeria, avant de s'installer à Londres il y a une quinzaine d'années. Son nom de scène lui-même témoigne de ce parcours : Obongjayar, cela vient de « obong » – roi, en efik, sa langue maternelle – et du mot « junior », remixé à sa sauce.

    Rien d'étonnant donc à ce que sa musique soit un savant mélange d'influences multiples grapillées ça et là. Un style unique en son genre, que l'artiste cultive savamment lui-même : « définir ma musique, ce serait l'enfermer dans une case. » Or, Obongjayar fonctionne à l'envie du moment, nul besoin donc de mettre des mots définitifs sur ces désirs : « qui peut dire ce dont il aura envie toute sa vie ? »

    À lire aussiObongjayar: «Définir ma musique, ce serait la mettre dans une case»

    Quand même, lorsqu'on insiste un peu, Steven Umoh accepte de donner un qualificatif : ce qu'il fait, « c'est de la post-afro », comprendre « ce qui vient après » les influences afro qui l'ont nourri. Là encore, cela reste vague, ça tombe bien : c'est précisément le but.

    Une liberté totale

    Ce que revendique en fait Obongjayar, c'est le fait d'exister en dehors des normes et des règles prédéfinies, pour se créer son propre espace d'expression. Un endroit où l'on peut parler, dans le même album, d'amour, de sexe, de spiritualité et de politique ; où l'on peut explorer des sonorités afropop et folk (« Holy Mountain ») autant que des influences punk (« Jellyfish ») ou l'univers sulfureux des cow-boys texans (« Sweet Danger »).

    C'est là le cœur de sa philosophie : ne pas se brider, ne pas mentir non plus. Une vulnérabilité qui peut surprendre, pour un artiste qui se revendique volontiers timide. Cela s'explique par une distinction essentielle : Obongjayar a beau être réservé sur certains sujets, il « ne [s]e cache pas ». « Je sais qui je suis, je sais ce que je veux. Avec ma musique, je suis intégralement nu. Et j'aime ce que je vois dans le miroir. »

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    6 min
  • De La Soul, «Cabin in the sky», un album hommage joyeux à l'ami disparu
    Dec 9 2025

    Neuvième album studio d'un groupe new yorkais mythique, De La Soul. Cabin in the Sky signe le retour des pionniers du hip hop alternatif américain avec un des membres du trio en moins Dave, dit « Trugoy The Dove », qui a eu le temps d'enregistrer quelques morceaux avant sa mort en 2023. Beaucoup de beau monde sur cet album où l'on rassemble les amis et où l'on fait la fête en pensant au disparu.

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    6 min
  • The Getdown, rencontre au sommet et respirations caribéennes
    Dec 8 2025

    Ce sont trois grandes figures du jazz français, reconnues depuis plus de quinze ans, mais qui n’avaient encore jamais joué ensemble. Le Guadeloupéen Arnaud Dolmen à la batterie, le Martiniquais Grégory Privat au piano et le Gardois Laurent Coulondre à l'orgue forment le collectif The Getdown, et dévoilent leur premier album éponyme.

    Les trois musiciens se croisaient régulièrement en concert, mais la véritable rencontre a eu lieu l'année dernière. Tous les trois étaient nominés pour le prix Django Reinhardt, qui récompense le musicien français de l'année. On leur propose de jouer ensemble le temps d'un morceau de six minutes... et la magie opère instantanément. S’ensuivent plusieurs sets au club parisien Le Duc des Lombards, qui scellent la naissance du collectif The Getdown.

    Claviers percussifs et batterie mélodique

    À la batterie, Arnaud Dolmen trouve naturellement sa place dans un dialogue déjà très dense entre les deux claviers, grâce à l'écoute et à la sensibilité au rythme des deux mélodistes qui l'accompagnent. De son côté, lui se passionne de plus en plus pour les claviers, et il repense sa batterie comme un instrument plus mélodique. Sans rien perdre de son énergie rythmique, mais avec une finesse proche de celle des claviers.

    Il explique : « C'est essayer de jouer avec les nuances, avec les quatre membres. Faire des sons plus longs avec la main droite, tandis que la grosse caisse, avec mon pied droit, peut-être plus sèche. Pendant ce temps, peut-être jouer plus fort avec la charleston. Essayer de faire sonner la batterie vraiment comme un orchestre, en fait. Et dans le tempo aussi, être plus souple. Parce que la différence entre la musique classique et la musique afro-caribéenne, ou afro tout simplement, c'est cette notion de respiration. Les batteurs que j'affectionne énormément et que j'ai beaucoup écoutés, eux aussi ils étaient ou sont pianistes. Donc je comprends cette manière de jouer la batterie. »

    Trois îles, trois univers, un seul groove

    Ce qui réunit les trois musiciens, c’est une grande ouverture musicale. Et sur ce disque, ils explorent des thèmes qui leur sont chers : la famille, l'amour de la musique, le sens de la fête... et bien sûr leurs influences caribéennes. Grégory Privat vient de Martinique, Arnaud Dolmen de Guadeloupe, et si Laurent Couloundre vient, lui, du sud de la France, il nourrit une vraie passion pour la musique cubaine. Résultat : la Caraïbe traverse tout l'album.

    Arnaud Dolmen raconte : « Dans cet album, j'ai fait un hommage à la biguine avec un morceau intitulé "Merci Biguine". La biguine, c'est un rythme issu des Antilles françaises et de la Guyane, qu'on joue énormément mais qu'on a aussi beaucoup joué dans les bals parisiens, à une époque. Il y a aussi un morceau qui s'appelle "Andidan", où je joue un rythme du Mas a Senjan : un rythme utilisé au Carnaval, aux Antilles. Au-delà du rythme, le Mas a Senjan est aussi une philosophie. Les groupes qui le jouent portent aussi une forme de dénonciation. »

    The Getdown oscille entre un groove très énergique et une douce mélancolie. L'orgue se fond dans le piano. Parfois, ils se répondent, sans jamais éclipser la batterie, au son sec et frontal. Une conversation joyeuse entre ces trois grands noms du jazz français.

    Le collectif sera en concert le 16 janvier 2026 au New Morning, à Paris.

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  • «Épopée Métèque», le voyage musical engagé du duo Bonbon Vodou
    Dec 5 2025

    Avec Épopée métèque, Bonbon Vodou confirme la vitalité de la rencontre entre chanson française et maloya réunionnais. Le duo, composé de Jérémie Boucris et Oriane Lacaille, signe un troisième album chaleureux et engagé, enrichi de collaborations prestigieuses. Dans une ambiance métissée, ils célèbrent le partage, la mémoire et l’imaginaire, pour délivrer un disque qui réveille les sens, invite à la réflexion et insuffle l’énergie du vivre-ensemble.

    Bonbon Vodou, c’est la rencontre entre Jérémie Boucris, musicien du sud-ouest de la France, et Oriane Lacaille, héritière d’une grande lignée musicale réunionnaise. Ensemble, ils tissent un univers où la chanson française se mêle aux sonorités du maloya, la musique traditionnelle de La Réunion. Leur nouvel album, Épopée métèque, s’ouvre sur « Cérémonie du piment piment », une invitation sensorielle qui reflète bien l’esprit du groupe : douceur apparente, mais piquant bien présent, à l’image du fameux bonbon piment réunionnais.

    Ce disque lumineux et conscient se distingue par sa capacité à créer un espace de partage et d’inspiration, où chaque morceau déploie une poésie de l’instant, portée par des arrangements inventifs et l’alchimie évidente des deux artistes.

    Partage musical et engagement poétique

    Épopée métèque s’illustre aussi par la richesse de ses collaborations : Bernard Lavilliers, Mouss & Hakim (Zebda), René Lacaille, Rosemary Standley, Nellyla, Fixi, Djé Baleti ou encore Maya Kamaty viennent prêter leur voix et leur énergie à cette aventure sonore. Le titre « Demerd Azot with that », en duo avec Maya Kamaty, interpelle sur la question de la transmission et de la mémoire des histoires coloniales, rappelant que la musique peut aussi être un espace de résistance et de revendication.

    Tout au long de l’album, Bonbon Vodou aborde des thèmes universels comme la lutte sociale, la mémoire collective et l’identité, tout en célébrant la diversité et l’imaginaire. Un album à découvrir, pour ressentir à la fois la chaleur de l’engagement et la force du métissage musical.

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    6 min