Quelque part entre l'afrobeat, le rock, la pop et le hip-hop, à l'intersection entre son Nigeria natal et la scène musicale britannique : voilà où se situe Obongjayar, l'artiste nigérian, propulsé sous les feux des projecteurs depuis sa collaboration avec Fred Again. Sur le titre « Adore U », faisait partie des quelque 70 artistes invités à l'édition 2025 des TransMusicales de Rennes. Rencontre.
Dans la vie, Obongjayar est comme sur scène et en studio : plein d'énergie, débordant d'idées et de métaphores de son cru. L'artiste nigérian d'une trentaine d'années n'hésite ainsi pas à comparer sa musique à un velouté « Pour faire une bonne soupe, saine et nutritive, il faut plein d'ingrédients. Ma musique, c'est pareil. »
Et d'ingrédients, sa musique en foisonne : de son EP Which Way is Forward (2020) à son récent album Paradise Now (2025), les influences se croisent et se rencontrent, et les lignes se brouillent un peu plus à chaque projet. Les inspirations afrobeat sont évidentes (« je suis nigérian, africain, ce sont mes racines »), mais elles se mêlent aussi de sonorités soul, funk, hip hop ou rock. Et sa voix, tantôt falsetto surprenant, tantôt grave et rocailleuse, évolue au gré des sonorités de ses morceaux. « Ma musique, c'est un mélange entre là d'où je viens, et tout ce à quoi j'ai été exposé ensuite », explique le chanteur sans chichis ni fioritures.
Le Nigeria, et tout le reste Car derrière Obongjayar, il y a surtout Steven Umoh, un trentenaire qui a vécu à Calabar, dans le sud du Nigeria, avant de s'installer à Londres il y a une quinzaine d'années. Son nom de scène lui-même témoigne de ce parcours : Obongjayar, cela vient de « obong » – roi, en efik, sa langue maternelle – et du mot « junior », remixé à sa sauce.
Rien d'étonnant donc à ce que sa musique soit un savant mélange d'influences multiples grapillées ça et là. Un style unique en son genre, que l'artiste cultive savamment lui-même : « définir ma musique, ce serait l'enfermer dans une case. » Or, Obongjayar fonctionne à l'envie du moment, nul besoin donc de mettre des mots définitifs sur ces désirs : « qui peut dire ce dont il aura envie toute sa vie ? »
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Quand même, lorsqu'on insiste un peu, Steven Umoh accepte de donner un qualificatif : ce qu'il fait, « c'est de la post-afro », comprendre « ce qui vient après » les influences afro qui l'ont nourri. Là encore, cela reste vague, ça tombe bien : c'est précisément le but.
Une liberté totale Ce que revendique en fait Obongjayar, c'est le fait d'exister en dehors des normes et des règles prédéfinies, pour se créer son propre espace d'expression. Un endroit où l'on peut parler, dans le même album, d'amour, de sexe, de spiritualité et de politique ; où l'on peut explorer des sonorités afropop et folk (« Holy Mountain ») autant que des influences punk (« Jellyfish ») ou l'univers sulfureux des cow-boys texans (« Sweet Danger »).
C'est là le cœur de sa philosophie : ne pas se brider, ne pas mentir non plus. Une vulnérabilité qui peut surprendre, pour un artiste qui se revendique volontiers timide. Cela s'explique par une distinction essentielle : Obongjayar a beau être réservé sur certains sujets, il « ne [s]e cache pas ». « Je sais qui je suis, je sais ce que je veux. Avec ma musique, je suis intégralement nu. Et j'aime ce que je vois dans le miroir. »