Épisodes

  • Nicușor Dan : «Nous avons un parti anti-européen et pro-russe qui atteint 40% des voix»
    Dec 12 2025
    Cette semaine, nous recevons Nicușor Dan, président de la Roumanie. Récemment élu, il commente les défis à mener par son pays en termes de budget et de corruption et réitère son alignement aux valeurs européennes. Nicușor Dan a été élu président en mai 2025 avec 53,6% des suffrages face au candidat d'extrême droite George Simion, pro-Trump, populiste et eurosceptique. Le président, de son côté, l’a remporté avec un programme pro-européen et anticorruption. Ce suffrage a fait suite à l’élection présidentielle de novembre 2024, annulée du fait de l'invalidation des résultats du premier tour. La Cour constitutionnelle du pays avait alors invoqué l'usage irrégulier de TikTok comme outil de campagne permettant au candidat pro-russe Calin Georgescu d’arriver en tête au premier tour du scrutin. Avec plus de recul, Nicușor Dan affirme aujourd’hui que la Cour constitutionnelle a eu raison d’annuler cette élection : «Il y a eu une influence russe et les règles de financement de la campagne électorale n’ont pas été bien respectées. [...] Nous pouvons aujourd’hui dire que la campagne de désinformation russe a commencé, il y a dix ans. Les autorités roumaines ont pris cela à la légère. Pourtant, une technologie très sophistiquée a impacté les dernières semaines de la campagne électorale.» «L’année prochaine, nous serons entre 6 et 6,5% de déficit» La Roumanie, pays de 19 millions d’habitants, a connu une progression de 134% de son pouvoir d'achat moyen en vingt ans, la plus importante d’Europe. Cependant, le déficit du pays atteint 9%, trois fois la limite autorisée par les règles de l’Union européenne (UE). Pour remédier à cela, le gouvernement a mis en place des mesures d'austérité : «Ces mesures seront reconduites l’année prochaine, il n’y aura pas de mesures supplémentaires dont les gens ne sont pas encore au courant. L’année prochaine, nous serons entre 6 et 6,5% de déficit. Ces mesures sont difficiles mais nous n’avons pas le choix car nous avons une dette publique. Nous devons montrer aux investisseurs, aux fonds d’investissement et aux banques que la Roumanie va régler son déficit.» «Il y a de la corruption à tous les niveaux» Alors que la Bulgarie voisine a vu son gouvernement chuter après de grandes manifestations anti-corruption, Nicușor Dan a fait de la lutte contre la corruption son fer de lance dans un pays particulièrement touché par celle-ci : «En Roumanie, il y a de la corruption à tous les niveaux. Pour lutter contre, nous avons besoin de prendre des mesures administratives mais aussi agir au sein du système de justice. Il y a une volonté de lutter contre la corruption mais cela va prendre du temps.» Le 7 décembre, le libéral Ciprian Ciucu a été élu maire de Bucarest devant la candidate d’extrême droite Anca Alexandrescu. Cette dernière figurait cependant en tête des sondages, alors que Bucarest n'est traditionnellement pas une place forte de l'extrême droite. «Nous avons un parti anti-européen et même pro-russe, qui, en s’alliant à d’autres petits partis, atteint 35 à 40% des votes», indique Nicusor Dan, ancien maire de Bucarest, en référence au parti Alliance pour l'unité des Roumains (AUR). «Mais les gens qui votent pour ces partis ne sont pas forcément anti-européens ou pro-russes. Il se sentent abandonnés par les autres, par les politiques des partis disons classiques, qui sont pro-européens. Nous devons regagner leur confiance dans les prochaines années.» «Stimuler notre économie de défense européenne» Dans un contexte de tension sécuritaire au niveau européen, la Roumanie, qui partage 650 km de frontière commune avec l'Ukraine, a fortement augmenté ses dépenses militaires ces dernières années. Celles-ci représentaient 2,2% de son PIB en 2024 et devraient atteindre 2,5% en 2025. L’UE a d’ailleurs alloué 16,7 milliards d'euros au pays dans le cadre de son programme SAFE, un instrument de prêt à prix compétitifs pour le secteur de la défense. S’il dit ne pas craindre une confrontation directe avec la Russie, il affirme que les positions européennes doivent être claires : «Nous devons faire savoir à la Russie que nous sommes prêts. Bien sûr, nous ne souhaitons pas avoir une guerre sur le territoire européen mais nous devons leur dire : ‘Si vous voulez attaquer, nous sommes prêts'.» Nicușor Dan explique que, par le passé, la défense n’était pas un secteur parmi d’autres, pas plus important que celui de la santé par exemple. «Avec le contexte géopolitique actuel, l’Europe doit agir pour être capable, dans un laps de temps le plus court possible, de se défendre.» En matière d’achat d’armement, le président roumain reconnaît avoir conclu des contrats avec des entreprises américaines valables «jusqu’à 2033». Il incite aujourd’hui à «stimuler notre économie de défense européenne...
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  • Pierre Moscovici: «La France s'affaiblit et a un nœud coulant autour du cou»
    Dec 5 2025
    Cette semaine, nous accueillons Pierre Moscovici, qui quitte la présidence de la Cour des comptes française pour rejoindre la Cour des comptes européenne. Cet ancien député et commissaire européen tire la sonnette d’alarme sur l’état des finances de la France et appelle l’UE à être unie face au plan de paix des États-Unis pour l’Ukraine. La dette française s’élève à un niveau record de 115,6%, la troisième plus haute des Vingt-Sept, derrière la Grèce et l'Italie. Son déficit représente 5,4% de son PIB faisant de la France l’un des plus mauvais élèves de l’Union européenne (UE). Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes en France et ancien ministre, rappelle que la France «n'est pas n'importe quel pays, ni dans le monde, ni dans l'UE. Elle a un rôle moteur dans la construction européenne». Bien que le pays soit la deuxième plus importante économie de l’Union, il reconnaît ses difficultés budgétaires : «Si la France n'est pas capable de balayer devant sa porte, sa crédibilité est atteinte. [...] La dynamique de notre dette est mauvaise. Nous sommes les seuls dont la dette croît autant. Notre déficit est le plus élevé de la zone euro.» Pierre Moscovici, également ancien député et commissaire européen, évoque les difficultés budgétaires passées de la Belgique, l'Espagne, le Portugal ou la Grèce : «À l’époque où j’étais commissaire, penser que nous aurions des taux d'intérêt plus élevés que ces pays était inimaginable. [...] En se retrouvant dans cette situation, nous ne pouvons pas faire face aux défis du futur que sont le financement de la transition écologique, de la transition numérique, que sont l'effort de défense ou le renforcement de notre capacité d'innovation et de recherche. [...] La France s'affaiblit et a un nœud coulant autour du cou, qui, petit à petit, la rend impuissante et l'empêche d'agir pour le bien de ses citoyens.» Alors que la France est en plein vote de son budget pour l’année 2026, Pierre Moscovici met en garde : «Si nous voulons rester sur une trajectoire qui nous amène à moins de 3% de déficit en 2029, et c'est fondamental pour inverser le cours de la dette, il faut que le budget voté nous emmène sous les 5% de déficit.» «La paix ne peut pas se faire aux conditions de Poutine» Les États-Unis tentent de négocier un plan de paix entre l’Ukraine et la Russie et semblent peu se préoccuper de l’avis des Européens. «Nous ne pouvons pas avoir des négociations purement russo-américaines et traiter du sort des Ukrainiens sans eux et sans leur président légitime, monsieur Zelensky. [...] Nous ne pouvons pas non plus discuter de l'avenir de l'Ukraine sans les Européens, parce qu'elle est sur notre continent et que les garanties de sécurité, le moment venu, doivent être européennes. La paix doit préserver les intérêts des Ukrainiens et ne peut pas être une paix aux conditions de Vladimir Poutine.» La Commission européenne a présenté cette semaine un plan pour financer l’Ukraine sur deux ans. Pour ce faire, l’une des options retenues est d’avoir recours aux avoirs russes gelés en Europe, dont l’immense majorité est immobilisée en Belgique. Par peur de représailles russes, les Belges s’opposent pour le moment à cette option. S’il explique ne pas avoir un éclairage complet sur la légalité de la réquisition de ces avoirs, il n’est pas contre l’idée proposée par la Commission : «Il me paraîtrait bon que la volonté exprimée d'utiliser ses avoirs russes gelés aille jusqu'au bout pour financer ce que nous devons à l'Ukraine. Il faut naturellement limiter les risques. Il faut offrir des garanties aux États membres.» «Pour être entendu, il faut être soi-même volontaire» Il appelle les Vingt-Sept à «aller de l’avant» au sujet de ces avoirs russes : «Si nous sommes trop timides, trop repliés sur nos intérêts nationaux et pas suffisamment actifs, alors il ne faut pas s'étonner d'être une étape qu'on rate. Pour être entendu, il faut être soi-même volontaire.» L’autre option envisagée par la Commission pour financer ce prêt est le recours à un emprunt européen mais cela nécessite l’accord à l'unanimité des États membres. Certains d’entre eux, comme la Hongrie, s’opposent à cette proposition. Un système de vote à l’unanimité remis en question par l’ancien ministre français des Affaires européennes : «Il faut avancer. Le problème de l'Europe, c'est ce consensus que nous devons chercher. J'ai toujours respecté tous les États membres. Il faut les traiter comme tous égaux mais il ne faut pas non plus accepter cette logique du veto. Il faut aller vers davantage et même la totalité des décisions qui soit prise au vote à la majorité qualifiée.» Il dénonce le fait que certains dirigeants comme le Premier ministre hongrois Viktor Orban ou le Slovaque Robert Fico «ont ...
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  • Maxime Prévot «Saisir les avoirs gelés russes, pose un problème en droit international»
    Nov 28 2025
    Face au plan de paix de Donald Trump pour l'Ukraine qui laisse encore l’Union européenne à la traine, Maxime Prévot, ministre belge des Affaires étrangères s’exprime sur ce conflit au cœur de l’Europe. Il évoque les enjeux de défense : réarmement, service national et la question sensible des avoirs russes gelés. Il commente aussi les questions de politique intérieure. Maxime Prévot regrette que pour Gaza, comme pour l’Ukraine, l’UE qui est pourtant au cœur de son territoire, les Européens soient laisses de côté. S’il salue par principe les efforts des Américains pour la paix, il remarque ironiquement que «les USA choisissent le restaurant, commandent le menu mais c’est l’Union européenne qui doit payer la facture». Une situation inacceptable : «Il ne peut pas y avoir de solution de paix durable qui concerne l'Ukraine sans l'Ukraine et sans l'Europe, nous sommes nous-mêmes des acteurs-clé qui doivent être autour de la table» Il souhaite participer à l'édification d'une stratégie qui ne discrédite pas l'Ukraine. «L'objectif n'a jamais été de veiller à ce que celle-ci mette un genou en terre ou abdique. Je rappelle qu'elle est la victime de cette guerre». Le ministre rappelle que les questions de l’intégrité territoriale sont essentielles non seulement par rapport à l'Ukraine, mais aussi eu égard droit international. Il ne peut pas y avoir de place non plus pour l'impunité pour des actes d'agression posés par la Russie, et ajoute-t-il «c'est la raison pour laquelle un scénario de paix avec la force comme moteur qui tord le bras aux Ukrainiens n'est pas acceptable». Selon le ministre Maxime Prévot, malgré les scandales de corruption dans l’entourage du président ukrainien, Volodymr Zelensky reste le mieux à même de défendre les intérêts des Ukrainiens. Il fait confiance à la justice ukrainienne pour tirer cela au clair, mais refuse que cette question soit instrumentalisée pour fragiliser le président et donc le peuple ukrainien. Sur la question sensible des avoirs gelés russes que les Européens voudraient utiliser à hauteur de 140 milliards d’euros pour financer les réparations en Ukraine, Maxime Prévot reste inflexible. Il évoque des problèmes juridiques liés à toute démarche qui pourrait être assimilable à une confiscation et aux mesures de rétorsion auxquels la Belgique seule ne pourrait faire face. Selon lui, pour aider l’Ukraine : «Il nous semble que la meilleure voie à suivre est celle d'un emprunt directement contracté par l'Union européenne» même si Viktor Orban proche du Kremlin y mettrait son veto. Toujours en matière de défense, la Belgique comme la France se soucie de son réarmement et a décidé elle aussi de rétablir un service militaire volontaire. «Avec l'espoir», explique Maxime Prévot, «de susciter des vocations qui permettront d'accroître l'enrôlement dans nos forces armées par la suite.» Il reconnait que la Belgique a souvent été l'un des mauvais élèves de l'OTAN pour ses investissements en matière de défense. «Le gouvernement a décidé de changer cet état de situation. Avec des financements à plusieurs dizaines de milliards d'euros qui vont être mobilisés pour rattraper notre retard et continuer d'être un partenaire fiable de l'OTAN» Sur la situation économique en Belgique avec une dette publique brute de 107% du PIB en 2025, un déficit de 5,3% du PIB et une grève qui a paralysé le pays plusieurs jours, le ministre estime que l'Union européenne a eu raison de tirer la sonnette d'alarme. «Nous avons fait œuvre de pédagogie auprès de nos populations en expliquant qu'on ne pouvait plus vivre au-dessus de nos moyens, que ces dernières décennies, des réformes indispensables qui devaient être prises, fussent-elles impopulaires, ne l'ont pas été. On se trouve maintenant au pied du mur, avec le risque d'être potentiellement l'un des plus mauvais élèves de la zone euro. Et donc, explique-t-il, «en un an, nous avons fait un effort de redressement structurel de nos finances de 32 milliards d'euros. C'est du jamais vu depuis ces 50 dernières années. Ça se fait évidemment avec des grincements de dents. Nous en sommes conscients, nous l'assumons.» Le ministre Prévot rappelle par ailleurs, «que la Belgique est connue pour son sens du compromis. Nous avons un gouvernement composé de cinq partis, un socialiste, deux centristes, deux libéraux et conservateurs. Mais nous arrivons à faire bouger le pays parce que de longue date, nous avons compris que faire un compromis, ce n'était pas se compromettre. Je pense que ça peut probablement inspirer d'autres pays qui nous sont proches.»
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  • Bartjan Wegter: «La police anti-terroriste doit accéder aux messages cryptés»
    Nov 21 2025
    Cette semaine, nous recevons Bartjan Wegter, coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme. 10 ans après les attentats qui ont frappé la France, il détaille les mesures mises en place par l’UE pour contrer le terrorisme et alerte sur un risque d’attaque toujours élevé. La France a récemment commémoré les 10 ans des attentats du 13 novembre 2015 lors desquels 132 morts ont perdu la vie. Bartjan Wegter, coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme, un poste créé en 2004 après les attentats de Madrid, qualifie ces hommages de «très émouvants». «C’était impressionnant d'entendre les témoignages et de voir les survivants de ces attentats horribles qui ont choqué la France», s'émeut-il. «Il faut rester vigilant» Après ces attentats, Bartjan Wegter parle «d’un tournant historique dans la lutte contre le terrorisme dans l’Union européenne (UE)» : «Nous nous sommes rendus compte qu'il fallait mieux s'organiser au niveau européen, qu'il fallait penser au-delà du niveau national.» Il explique que les auteurs de ces attaques ont «profité de la libre circulation en Europe» afin de commettre ces attentats. «Nous avons renforcé nos frontières extérieures et nous avons établi des bases de données interopérables. [...] Nous avons aussi renforcé la coopération de la police et de la justice grâce à Europol et Eurojust, deux agences impliquées dans le domaine. Nous avons fait en sorte de renforcer leur rôle. [...] Nous avons créé une task force sous le nom de fraternité franco-belge afin de mener les enquêtes nécessaires dans le contexte de ces attentats. [...] L’Europe s'est mieux organisée de façon stratégique pour appréhender le futur et prendre en considération les menaces à venir.» S’il évoque des progrès réalisés en matière de contre-terrorisme, Bartjan Wegter explique qu’il «faut rester vigilant» : «Je dirais que nous sommes mieux placés aujourd'hui qu'il y a dix ans. [...] Beaucoup d'attentats ont été déjoués. [...] Mais la menace numéro un en Europe reste toujours le jihadisme.» «Daech recrute désormais en Europe, parmi les plus jeunes» En Europe, un suspect de terrorisme sur trois est un mineur ou un jeune adulte. Selon Bartjan Wegter, cela s’explique par le fait que cette population soit «particulièrement vulnérable». «Ils sont victimes de désinformation et notamment de la propagande de Daech qui a été très ciblée et très efficace dans de multiples langues et qui visait justement les mineurs. Ils utilisent par exemple des plateformes de gaming pour atteindre les jeunes», détaille-t-il. «Une diminution des efforts de modération en ligne» Pour lutter contre la radicalisation en ligne et les méfaits des réseaux sociaux sur les jeunes, la France réfléchit à l'interdiction de leur usage avant quinze ans. Des menaces provenant des réseaux sociaux que Bartjan Wegter observe également : «Il y a plusieurs mouvements qui influencent tout ce qui se passe en ligne et qui influencent nos jeunes et risquent de les radicaliser. Il y a l'ultra droite, l'ultra gauche.» Il note un risque particulier pour les «jeunes garçons» qui peuvent être «attirés par l'ultra violence.» Selon lui, les grandes entreprises de la tech détenant ces réseaux sociaux doivent jouer un rôle : «Nous voyons une diminution des efforts de modération de la part de la plupart de ces compagnies. [...] Derrière tout cela, il y a les algorithmes qui amplifient le genre de contenu qui pose problème et qui risque de radicaliser nos jeunes.» S’il se félicite de la possibilité pour les utilisateurs d’utiliser des messageries cryptées afin de protéger leur vie privée, il déplore une difficulté pour les enquêteurs d’accéder à ces données : «Il faut avoir un débat clair et honnête qui reconnaît le besoin de permettre à nos enquêteurs de mener à bien leurs enquêtes, toujours dans le respect de la loi, comme ils l'ont toujours fait depuis des années, par exemple quand il y avait des paquets suspects ou des lettres à ouvrir. [...] C'est la même chose pour tout ce qui est digital car nous constatons que plus de 80% des enquêtes sont maintenant dans le domaine digital. Il faut permettre à nos enquêteurs de faire leur travail. Pour cela, il faut une coopération de l'industrie et des plateformes.» «Ce qui se passe en Afrique va toucher notre sécurité intérieure» Dans la région du Sahel en Afrique de l’Ouest, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (Jnim), lié à al-Qaïda, gagne du terrain. Bartjan Wegter explique que l’UE collabore avec de nombreux pays africains au sujet de cette menace terroriste : «Les pays en Afrique occidentale ont besoin de notre soutien et de notre expérience pour lutter contre le terrorisme. [...] C'est une région qui nous préoccupe. [...] Tout ce qui se passe hors de nos frontières risque, à un certain moment, de toucher notre ...
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  • Christina Egelund: «Le développement technologique est au cœur d’une bataille mondiale»
    Nov 14 2025
    Cette semaine, nous accueillons Christina Egelund, ministre danoise de l'Enseignement supérieur et de la Science. Renforcement de la défense, développement de l’intelligence artificielle et course à l’espace, elle évoque les domaines-clé pour relancer la compétitivité de l’Union. Le Danemark est à la tête de la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne (UE) jusqu’à la fin de l’année 2025. Christina Egelund, ministre danoise de l'Enseignement supérieur et de la Science au sein du gouvernement de coalition tripartite entre socialistes et centre droit de Mette Frederiksen, estime qu’il s’agit d’un «moment crucial pour l'Europe». «Il y a une guerre sur le terrain européen, une concurrence technologique, des changements climatiques, l’élargissement de l’UE […] Tout cela était dans notre agenda […] avec l'ambition d'avoir une Europe unie et forte.» «Nous allons rétablir une industrie militaire de défense en Europe» Ces derniers mois, le Danemark a été la cible de multiples incursions de drones sur son territoire, notamment au-dessus d’aéroports, causant ainsi des interruptions du trafic aérien. «Je n'aurais jamais imaginé qu'au Danemark, qui est un pays pacifiste, nous soyons survolés par des drones», s’alarme Christina Egelund. Si l’origine des drones est encore inconnue, le gouvernement a déclaré qu’il ne fallait pas exclure une implication russe. «Cela montre que le développement technologique est au cœur de cette bataille mondiale,» poursuit la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. En termes de défense, le pays nordique va augmenter cette année son budget militaire à 3,5% de son PIB contre 2,3% en 2024. En 2022, le pays a réintégré la politique de sécurité et de défense commune de l'Union, après une exemption de 30 ans. «Nous allons rétablir une industrie militaire de défense en Europe et dans mon pays. Pendant beaucoup d'années, nous n’avons pas assez investi dans notre défense», insiste la ministre danoise. «D’ici 2030, nous y investirons 5% de notre PIB, comme le réclame l’OTAN. C'est la priorité numéro un pour notre gouvernement.» Pour ce faire, elle encourage l’utilisation de biens civils pour des usages militaires, tels que les drones : «Nous sommes dans un contexte et dans un moment dans l'histoire où investir dans la recherche uniquement pour un usage civil, c'est un luxe qu'on ne peut plus vraiment se permettre.» «Il faut absolument rester dans la course» Alors que l’usage de l’intelligence artificielle se développe à toute vitesse aux États-Unis sur fond de dérégulation décidée par l'administration Trump, l’Europe peine à se démarquer dans ce domaine. Selon Christina Egelund, «il faut absolument rester dans la course». «L'intelligence artificielle est probablement la nouvelle technologie qui vient avec le pouvoir transformatif le plus fort qu'on a connu depuis très longtemps, peut-être depuis la révolution industrielle. Si elle appelle à investir dans cette technologie, elle se doit, selon elle, de se conformer aux «valeurs européennes» telles que «le respect pour l'individu, l'humanité, les valeurs démocratiques, la transparence.» Pourtant, les États-Unis demandent à l’UE d’assouplir sa régulation numérique car elle impacte tout particulièrement les firmes de tech américaines. Des contraintes aux entreprises que l’UE s'apprête à assouplir. «Est-ce que nous voulons laisser cela aux mains non seulement d'un autre pays, les États-Unis, mais également des grosses entreprises avec un leadership qui n'est pas élu démocratiquement ?», s’interroge la ministre. Pour faire front, elle appelle de ses vœux à investir dans «des infrastructures européennes», comme des usines géantes à intelligence artificielle partagées entre plusieurs États, sans compétition pour les attirer sur un territoire particulier. «Nous avons besoin d'attirer du travail depuis l'extérieur» Le Danemark, dont la démographie est fortement en baisse, a besoin de main-d'œuvre. Elle tente ainsi d’attirer des talents de l’étranger : «Nous avons besoin d'attirer du travail depuis l'extérieur, mais aussi des étudiants que nous pouvons former et qui, je l'espère, auront envie de rester ici.» Pourtant, le pays dirigé par une sociale-démocrate a l'une des politiques d’immigration les plus restrictives en Europe, ce qui, selon la ministre, n’est pas en contradiction avec sa volonté d’accueillir des étrangers : «Je pense qu'il faut faire une distinction entre les gens qui viennent pour travailler ou étudier et la migration. Dans ce débat, nous avons tendance à tout mélanger. […] Nous avons une économie ouverte et dépendons des collaborations internationales. Nous sommes absolument ouverts aux étudiants et aux gens qui veulent venir pour travailler», se justifie-t-elle.
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  • Charles Michel : «Je ne crois pas que ce soit la fin du libre-échange»
    Nov 7 2025
    Cette semaine, nous accueillons Charles Michel, ancien président du Conseil européen et ancien Premier ministre de la Belgique. Ambitions climatiques, relations transatlantiques et renforcement de la défense : il commente les dossiers brûlants de l’actualité européenne. En amont de la Conférence des Nations unies sur le climat (COP30) au Brésil, les Vingt-Sept se sont entendus sur un objectif de réduction, d’ici 2040, de 90% de leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990. À l’horizon 2035, ces émissions devront être comprises dans une fourchette de -66,25% à -72,5% par rapport à 1990. Un accord arraché in extremis alors que certains pays réticents à la transition écologique comme l’Italie ou la Pologne sont parvenus à obtenir plus de flexibilité. La position de l’UE est jugée trop peu ambitieuse par les défenseurs de l’environnement. Charles Michel, ancien président du Conseil européen de 2019 à 2024, tempère ces critiques : «Les Européens sont extrêmement ambitieux, à la fois sur les objectifs qu'il faut atteindre mais aussi en termes de solidarité avec les pays en développement. Il faut soutenir les capacités des pays en développement pour qu’ils aient accès aux technologies afin de surmonter ensemble ce défi climatique.» Il demande une simplification des régulations : «Je comprends que les chefs d'État et de gouvernement fassent preuve de prudence. [...] La mise en œuvre des mesures a conduit à alourdir considérablement la bureaucratie sur le dos de nos entreprises. Cela a handicapé la capacité de nos entreprises à innover et à se déployer. Je pense que les États membres sont aussi échaudés par la manière dont la Commission européenne propose une régulation tout à fait excessive et veut absolument tout réguler. [...] Nous pouvons totalement concilier l'ambition de réussir à faire reculer cette menace climatique tout en simplifiant nos régulations.» «L’UE a manqué de vigueur dans la défense des intérêts européens» Un an après la réélection de Donald Trump à la tête des États-Unis, les relations avec l’Union sont toujours aussi tumultueuses. D’un point de vue commercial, les droits de douane supplémentaires imposés par l’Administration américaine sur les exportations européennes sont jugés par certains comme désavantageux pour les Vingt-Sept. Charles Michel, également ancien Premier ministre de la Belgique et issu du parti libéral fustige l’action de l’Union : «Je vois une espèce d'effondrement face aux États-Unis et c'est une claque.» «Ces derniers mois, elle a manqué de vigueur dans la défense des intérêts européens. Elle a manqué de vigueur dans les efforts d'émancipation par rapport aux États-Unis et en termes de réformes nécessaires pour plus de compétitivité.» Malgré un durcissement des tarifs douaniers, il ne «croit pas que ce soit la fin du libre-échange». «Ne pas se comporter en instruments des États-Unis» Alors que les États-Unis et la Chine négocient une trêve commerciale, notamment en matière de droits de douane, Charles Michel s’inquiète de voir l’UE «instrumentalisée par les États-Unis qui l’utilisent dans [sa] compétition et [son] combat contre la Chine». «Il y a deux options possibles : soit cette compétition entre la Chine et les États-Unis escalade au point qu'il y ait un conflit grave dont nous paierons les conséquences, soit il y a un accord entre la Chine et les États-Unis et nous en paierons aussi les conséquences.» Il appelle les dirigeants européens à agir : «Je ne sais pas ce qu'il faut de plus à un certain nombre de leaders européens pour comprendre que nous devons développer une stratégie européenne fondée sur nos propres intérêts.» Il prône ainsi de maintenir des liens avec la Chine pour contrer les États-Unis : «Nous avons des différences majeures avec la Chine mais nous avons un certain nombre de rapprochements sur les sujets globaux, comme le climat par exemple. La Chine investit beaucoup en matière de climat et met en place la tarification du carbone. C’est le même modèle que nous avons mis en place sur le plan européen. Les États-Unis ne font pas ça.» Charles Michel souhaite que l’UE négocie âprement «pour trouver des compromis et pas simplement se comporter en instruments des États-Unis dans leur compétition avec la Chine». «Nous avons besoin de plus de souveraineté européenne» En outre, le président américain demande aux Européens d’investir davantage dans leur défense et souffle le chaud et le froid en ce qui concerne son soutien financier et militaire à l’Ukraine. «Nous avons besoin de plus de souveraineté européenne. Nous avons besoin d'investir dans la sécurité et la défense, en plus des efforts nécessaires pour consolider notre base économique», juge l’ancien président du Conseil européen. Très critique ...
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  • Kaja Kallas : «Nous ne pouvons pas combler le vide d’aide humanitaire laissé par les Américains»
    Oct 31 2025

    Cette semaine, nous recevons Kaja Kallas en marge du Forum de Paris sur la Paix. La cheffe de la Diplomatie européenne revient sur les relations de l'UE avec les États-Unis de Donald Trump et la position de l'Europe sur différentes crises à travers le monde comme à Gaza, au Soudan et en Ukraine.

    Face à la multiplication des conflits, Kaja Kallas, Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, appelle de toute urgence à protéger l'état de droit. «Si l'on regarde ce qui se passe dans le monde, le droit international fait l'objet d'assauts répétés, alors qu'il constitue vraiment une protection pour les petits pays et empêche les grandes puissances voisines de dicter leur loi.» Une conception du monde qui s'oppose à celle de certaines puissances étrangères qui tentent de s'ingérer dans les affaires européennes pour affaiblir la position des Vingt-Sept : «Elles cherchent les petits feux qui consument nos sociétés et jettent de l'huile dessus de toutes parts. Car si nous nous entretuons, nous sommes plus faibles», met-elle en garde.

    Face à la menace russe, la vice-présidente de la Commission européenne appelle à renforcer la défense européenne, tout en niant que l'exécutif outrepasse ses compétences. «Les États nationaux ont la primauté en matière de défense, mais on peut essayer de les coordonner, de les organiser par groupes de pays, car certains projets sont trop gros pour un seul État, mais réalisables à plusieurs.» Elle souhaite s'inspirer du modèle ukrainien de production de drones pour développer des projets européens.

    La cheffe de la Diplomatie européenne se félicite du «cessez-le-feu très attendu, tout comme la libération des otages», mais rappelle qu'il reste précaire et qu'il ne s'agit que d'une première étape. «Il faut que la communauté internationale soit présente à chaque étape», martèle Kaja Kallas, qui estime que l’UE doit moins s’intéresser aux sanctions à appliquer et concentrer ses efforts sur sa participation à un processus de paix durable.

    Elle dénonce par ailleurs la situation «insoutenable» au Soudan, qui ne «capte pas assez l'attention des médias par rapport aux autres conflits». «Ceux qui soutiennent les parties en guerre en leur fournissant des armes doivent cesser de le faire», a-t-elle insisté.

    Kaja Kallas revient également sur la relation entre l'Union européenne et les États-Unis de Donald Trump. Le président américain «veut certainement une Amérique forte», ironise la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, «s’il s’agit pour cela d’affaiblir le monde, nous devons réfléchir à ce que nous devons faire, nous, Européens».

    En marge du Forum de Paris sur la paix, où une aide internationale de 1,5 milliard d'euros a été annoncée pour répondre aux crises dans la région des Grands Lacs en Afrique, la cheffe de la Diplomatie européenne a rappelé l'urgence d'apporter une aide humanitaire là où elle est nécessaire, tout en dénonçant la décision américaine de retirer son aide. «Tous les pays du monde attendent devant notre porte en nous demandant de combler le manque à gagner. Nos contribuables européens ne le peuvent pas. Nous essayons de faire notre devoir, mais nous ne pouvons pas combler le vide laissé par les Américains

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  • José Manuel Albares, «la réussite économique vient du dialogue social»
    Oct 24 2025
    Au lendemain d’un Conseil européen centré sur la question de l’aide à l’Ukraine, José Manuel Albares, ministre des Affaires étrangères espagnol revient sur ce contexte international. Il évoque aussi la situation de son pays dirigé par le socialiste Pedro Sanchez à la tête d’une coalition des gauches qui fait figure d’exception et de contre-modèle dans de nombreux domaines. Le dernier Conseil européen a voté un 19ème paquet de sanctions contre la Russie et une interdiction des importations de gaz russe, la question des avoirs financiers russes reste bloquée. Cette fois, c’est la Belgique qui refuse de piocher sur les 140 millions d’euros Russes, par crainte des représailles – les banques étant majoritairement sur son sol. Une situation que regrette José Manuel Albares : «Nous avons été les premiers à dire que les avoirs gelés russes pouvaient être utilisés pour aider l’Ukraine et que le droit international nous permettait de considérer que cela constituait des réparations par anticipation». Le ministre réaffirme d’ailleurs le soutien sans faille de son pays à l’Ukraine qui s’exprime par l’aide humanitaire, l’accueil de 250 000 réfugiés ukrainiens mais aussi l’aide militaire. Car, si l’Espagne refuse d’investir 5% de son PIB dans la défense via sa participation dans l’OTAN, elle est passée de 0,9% à 2%, rappelle José Manuel Albares qui précise que son pays est «Un partenaire, un allié fiable avec une contribution historique : 3 000 soldats espagnols déployés dans plusieurs pays de l’Europe de l’Est et nos avions qui participent à assurer la sécurité des ciels de la Baltique et contre les drones russes». Face au revirement de Donald Trump qui impose désormais des sanctions sur le pétrole russe, tout comme les Européens, José Manuel Albares prône l’union des alliés : «Pour l’Ukraine comme pour Gaza, il faut travailler à la Paix. Pour l’Ukraine, travailler sur la paix signifie faire pression sur les seuls qui ne veulent pas la paix ! Le président Zelensky a proposé un cessez-le-feu sans conditions mais les Russes et Vladimir Poutine ne le veulent pas.» Envers la Chine qui utilise la guerre commerciale contre l’Europe et ne souhaite pas la victoire de l’Ukraine, le ministre Albares estime qu’il faut utiliser l’arme diplomatique. Croissance économique et paix sociale Sur le plan intérieur, l’Espagne affiche de belles réussites avec un taux de croissance de 2, 9% - bien au-dessus de ses voisins comme la France (0,7%) ou l’Allemagne (0,2%) «Il y a beaucoup de travail derrière ces chiffres», explique le Ministre Albares. Il se félicite aussi de la réduction du chômage, du contrôle du déficit et de la dette. «Mais surtout, ce qui est très important pour nous, c'est que nous avons fait cela avec de la paix sociale, grâce au dialogue social avec les syndicats et le patronat. Et ça nous permet en même temps que la croissance macroéconomique et le contrôle des déficits et de la dette, une croissance du salaire minimum en Espagne de 60 % depuis qu'on est un gouvernement et des pensions minimum de 12 %.» Sur la question migratoire, José Manuel Albares explique combien son pays se distingue de l’Italie de Meloni : selon Frontex, sur les routes migratoires, l'Espagne a eu une réduction de 40% du trafic cette année par rapport à l'année dernière, et de 60% à travers les îles Canaries, la route la plus dangereuse pour arriver en Europe. «Je pense que face à l'immigration irrégulière, il faut dire la vérité aux citoyens. Les problèmes conjoncturels ont une solution. Les problèmes structurels ont une gestion. Tant que l'Afrique et l'Europe sont la frontière la plus inégale au monde peu importe si c’est le PIB, la santé, l'éducation, il y aura toujours une migration irrégulière en vers l'Europe.» Mais selon le ministre Albares, le modèle espagnol repose sur trois piliers : «Le premier, c'est un dialogue politique de très haut niveau avec nos partenaires africains le Maroc, le Sénégal, la Mauritanie, la Gambie, pour citer quelques-uns des plus importants. Le deuxième, c'est une aide au développement que nous avons triplé envers les pays de l'Afrique de l'Ouest pour étayer leurs programmes de réformes économiques, pour donner des opportunités à sa jeunesse. Et le troisième, une coopération avec ces pays pour être terriblement dur avec les mafias qui pratiquent le trafic d’ êtres humains.» Il conclut sur ce sujet : «Il faut dire la vérité, l'Europe a besoin de main-d'oeuvre qui vient d'ailleurs et la plupart des étrangers rentrent en Europe de façon légale. L’immigration irrégulière est minoritaire et certainement faire l'amalgame immigration et délinquance est faux.» Sur ce sujet comme sur d’autres, le gouvernement espagnol s’oppose aux mouvements et partis d’extrême droite qui montent en Europe. ...
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