Épisodes

  • Astrid von Busekist: «Pourquoi vouloir être un autre que soi-même ?»
    Sep 14 2025

    Dans son dernier essai en date, « L’ère des impostures », Astrid von Busekist, professeure de Théorie politique à Sciences Po, propose une nouvelle fois une analyse précise de notre société occidentale en s’intéressant aux dérives contemporaines liées aux identités. À l’heure où chacun revendique le droit de se définir librement, l’auteure interroge les limites de cette liberté : peut-on vraiment choisir son origine, sa race, sa mémoire ?

    Et que se passe-t-il lorsque cette revendication devient mensonge ? Ce sont les questions qu’elle traite au fil des pages de ce livre publié aux éditions Albin Michel. Elle est l’invitée d’IDÉES cette semaine.

    À travers des exemples littéraires, historiques et médiatiques, Astrid von Busekist que nous retrouvons avec plaisir dans l’émission explore avec sa clarté et sa précision habituelles, le phénomène de l’imposture identitaire — ces cas où des individus s’approprient une histoire ou une appartenance qui ne leur revient pas.

    De Coleman Silk, personnage de Philip Roth dans son roman « La tâche », aux faux rescapés de la Shoah, en passant par les controverses autour de figures se disant autochtones ou racisées, l’essai met en lumière une tension fondamentale : entre le désir d’émancipation individuelle et les exigences de vérité et de justice.

    Mais « L’ère des impostures » ne se contente pas de dénoncer. Le livre invite à réfléchir sur la manière dont nos sociétés construisent et verrouillent les identités, parfois au détriment de la complexité humaine. La philosophe critique une vision « carcérale » de l’appartenance, où l’origine devient une frontière infranchissable, et où toute tentative de déplacement est perçue comme une trahison.

    Astrid von Busekist interroge les fondements de notre rapport à nous-mêmes et aux autres. Son essai, à la fois philosophique et politique, s’adresse à tous ceux qui veulent comprendre les enjeux profonds de notre époque : entre quête de soi, mémoire collective et vérité partagée.

    Elle en parle avec pertinence, clarté, et énergie au micro de Pierre-Édouard Deldique dans ce nouveau numéro d’IDÉES, le magazine qui interroge celles et ceux qui pensent le monde.

    Programmation musicale

    - Jowee Omicil - Cry 4 Help

    - Arnaud Dolmen, Jowee Omicil et Michel Alibo - Silent Echoes.

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    41 min
  • La prudence n’est pas ce que vous croyez
    Sep 7 2025

    Entre la fuite en avant et le principe de précaution, notre invitée, érudite, Catherine Van Offelen propose une voie médiane, subtile et audacieuse : celle de la phronesis, cette prudence antique qui n’a rien de timorée.

    Dans son essai Risquer la prudence, elle exhume une vertu oubliée, à la fois pratique et courageuse, capable de guider l’action humaine dans l’incertitude.

    Catherine Van Offelen en parle avec une précision rare dans ce nouveau numéro d’Idées au micro de Pierre-Édouard Deldique.

    Contrairement à l’idée moderne de prudence – souvent associée à l’immobilisme ou à la peur du risque – cette jeune intellectuelle nous rappelle que la phronesis aristotélicienne est une forme de sagesse active. Elle ne consiste pas à éviter le danger, mais à l’évaluer avec justesse, à décider malgré l’ambiguïté, et à agir avec discernement. C’est une prudence qui ose, qui tranche.

    L’auteure critique le règne du principe de précaution, devenu selon elle un dogme paralysant. Elle plaide pour une réhabilitation de la décision humaine, fondée sur l’expérience, le jugement et une forme de courage intellectuel.

    Catherine Van Offelen, aux multiples références, puise dans les textes d’Aristote, mais aussi dans les traditions stoïcienne et chrétienne, pour montrer que la prudence n’est pas une faiblesse, mais une force. Elle est la vertu du capitaine dans la tempête, du médecin face à l’incertitude, du citoyen dans un monde complexe.

    Dans un style limpide et rigoureux, elle tisse des liens entre philosophie antique et enjeux contemporains : écologie, politique, éthique médicale, intelligence artificielle.

    Partout, la phronesis apparaît comme une boussole précieuse.

    Risquer la prudence est plus qu’un essai philosophique : c’est une invitation à penser autrement notre rapport au risque, à l’action et à la responsabilité. En réhabilitant cette vertu oubliée, Catherine Van Offelen nous offre une clé pour naviguer dans l’incertitude sans renoncer à agir.

    Son enthousiasme est roboratif. Il nous invite à être prudent, mais pas trop…

    Catherine Van Offelen, Risquer la prudence – Une pratique de la sagesse antique (Gallimard)

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    43 min
  • Monique Lévi-Strauss: «J’ai choisi la vie»
    Aug 31 2025

    Dans J’ai choisi la vie, Monique Lévi-Strauss, livre un récit intime et profond à travers une série d’entretiens menés par l’Académicien Marc Lambron. Ce livre est bien plus qu’une autobiographie : c’est une traversée du siècle, une plongée dans les souvenirs d’une femme qui a vécu les bouleversements majeurs du XXè siècle avec dignité, lucidité et une élégance rare. Pour IDÉES, Pierre-Edouard Deldique est parti à sa rencontre.

    Née en 1926, fille d’une mère juive et d’un père belge, Monique Lévi-Strauss a connu l’horreur du nazisme en Allemagne, où sa famille s’est installée en 1939. Elle y a vécu dans la peur constante d’être dénoncée, une expérience traumatisante qu’elle partage avec une sincérité bouleversante. Après la guerre, elle part aux États-Unis avant de revenir en France, où elle rencontre Claude Lévi-Strauss, qu’elle épousera en 1954.

    Monique n’est pas seulement la compagne du célèbre anthropologue. Elle est aussi une chercheuse reconnue, passionnée par les textiles anciens, notamment les châles, auxquels elle a consacré une partie de sa carrière. Elle a accompagné son mari dans ses expéditions, relu ses manuscrits, et participé activement à ses réflexions, tout en conservant son indépendance intellectuelle.

    Le livre est construit comme une conversation à bâtons rompus entre deux esprits brillants. On y découvre les goûts de Monique pour l’art, la littérature, la nature, mais aussi ses réflexions sur les grands événements du siècle. Elle évoque avec tendresse et humour sa vie, son admiration pour les écrits de son mari, dont elle fut la première lectrice exigeante.

    À ne pas manquer.

    Programmation musicale :

    - Jean-François Zygel, Antoine Hervé : Paris ; Sceaux.

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    39 min
  • Le désert: «Un territoire du vide forgé par un regard occidental»
    Aug 24 2025

    Dans IDÉES ce dimanche, Pierre-Edouard Deldique vous propose en quelque sorte une traversée du désert avec son invitée, Marie Gautheron, spécialiste d’histoire de l’art. Dans son livre Désert, déserts, du Moyen-Âge au XXIè siècle (Gallimard), elle propose d’analyser le regard occidental sur le désert avec force images.

    Marie Gautheron s’interroge dans son livre :

    « Pourquoi et depuis quand les vastes pays arides fascinent-ils l’Occident ? Ce livre raconte l’histoire sensible, esthétique et politique de nos images de déserts, entre créations et stéréotypes, fantasmes et savoirs positifs. Car l’image du désert n’a pas toujours été celle de ces sables à laquelle nous l’identifions souvent aujourd’hui. Née dans l’Orient judéo-chrétien, c’est d’abord celle, paradoxale, d’une expérience intérieure, et de tout espace abandonné de Dieu et des hommes.

    L’Occident médiéval la réinvente dans des clôtures ou des lieux d’ascèse et d’isolement, île ou forêt. Au fil des siècles, les déserts affreux de la verte Europe se muent en beaux déserts, tandis qu’un flux croissant d’Occidentaux parcourt les déserts d’Orient. Le vaste pays aride est alors promu paysage – sublime parfois, essentialisé souvent. Dans l’imaginaire hexagonal, la « pacification » du Sahara fait de l’empire du vide un champ de bataille, et une terre où rêver d’altérité. Espaces immersifs d’expériences extrêmes, les déserts sont l’objet d’enjeux géopolitiques majeurs au XXᵉ siècle, et le lieu de mutations radicales. Mondialisées, nos images de déserts s’ouvrent à de nouveaux lieux de mémoire. Figure de déréliction et d’exaltation, icône postmoderne de nos non-lieux, souvent déceptive et plus que jamais paradoxale, l’image du désert prête aux utopies, aux dystopies, et résonne encore d’antiques rémanences. »

    Elle en parle avec passion dans ce nouveau numéro d’IDÉES le magazine qui interroge ceux qui pensent le monde.

    Programmation musicale :

    • Maurice Jarre - Ouverture du film Lawrence d’Arabie
    • Ahman Pejman - Ecstasy ; Sunset
    • Félicien David (musique), Auguste Colin (paroles) - Ode-Symphonie Le désert
    • Yazz Ahmed - La Saboteuse
    • Vladimir Spivakov, Sergej Bezrodny - Spiegel im Spiegel (Miroir dans le miroir)Compositeur : Arvö Part
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    40 min
  • Giuliano da Empoli: l’heure des prédateurs a sonné
    Aug 17 2025

    Journaliste et écrivain, Giuliano da Empoli est un des esprits les plus brillants du moment. L’auteur des Ingénieurs du chaos ou du roman Le mage du Kremlin est l’invité de ce numéro d’Idées pour parler des « prédateurs qui sont au pouvoir aujourd’hui sur tous les continents ». (Rediffusion)

    Ancien adjoint au maire en charge de la culture à Florence, conseiller politique du président du Conseil italien Matteo Renzi, il a publié son premier livre en 1996, Un grande futuro dietro di noi à propos des difficultés rencontrées par les jeunes Italiens.

    En tant qu'auteur et commentateur politique, il intervient régulièrement dans des émissions télévisées et radiophoniques en Italie et en France.

    Il publie aujourd’hui L’heure des prédateurs chez Gallimard.

    « Aujourd’hui, l’heure des prédateurs a sonné et partout les choses évoluent d’une telle façon que tout ce qui doit être réglé le sera par le feu et par l’épée. Ce petit livre est le récit de cette conquête, écrit du point de vue d’un scribe aztèque et à sa manière, par images, plutôt que par concepts, dans le but de saisir le souffle d’un monde, au moment où il sombre dans l’abîme, et l’emprise glacée d’un autre, qui prend sa place. », écrit-il dans ce récit.

    Au micro de Pierre-Edouard Deldique, Giuliano da Empoli nous fait voyager de New York à Riyad, de l’ONU au Ritz-Carlton de MBS, « là où le pouvoir s’acquiert par des actions irréfléchies et tapageuses, où des autocrates décomplexés sont à l’affût du maximum de chaos, où les seigneurs de la tech semblent déjà habiter un autre monde, où l’IA s’avère incontrôlable ».

    L’auteur qui a une parfaite connaissance du milieu politique regarde sans ciller : « L’union de la rage et des algorithmes ». Il préconise de « réinventer une propagande adaptée à l’ère des selfies et des réseaux sociaux » car « le moment que nous vivons est machiavélien ».

    Idées, le magazine qui interroge ceux qui pensent le monde.

    Programmation musicale : Edouard FerletHerd instinct

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    39 min
  • «Nationalisme, attention danger !» selon le philosophe Marc Crépon
    Aug 10 2025

    Invité par Pierre-Edouard Deldique dans un nouveau numéro du magazine qui interroge ceux qui pensent le monde, Marc Crépon est inquiet. Philosophe, directeur de recherche au CNRS, professeur à l’École normale supérieure de Paris, ancien directeur du département de Philosophie de l’ENS, auteur notamment de La Vocation de l’écriture. La littérature et la philosophie à l’épreuve de la violence (2014), L’Épreuve de la haine (2016), Inhumaines conditions. Combattre l’intolérable (2018), Le Désir de résister (2022), Sept leçons sur la violence (2024), il nous propose cette fois « Le spectre du nationalisme » (Odile Jacob).

    « Qu’est-ce qui a manqué au rêve européen et à la construction de l’Europe pour que ressortent des oubliettes de l’histoire les idéologies nationalistes qui font aujourd’hui un retour en force sur toutes les scènes politiques européennes, avec leur cortège de discours discriminants et d’incitations à la haine et à la violence ? » s’interroge Marc Crépon.

    Dans ce livre, le philosophe reconnu tente de répondre en convoquant de grands intellectuels : Romain Rolland au lendemain de la Première Guerre mondiale, Julien Benda et Léon Blum, entre les deux guerres, Klaus Mann révélant dès 1933 l’emprise nazie sur la culture et l’éducation, Alberto Savinio dénonçant le discrédit de l’intelligence dans le fascisme italien, etc.

    « Nous voici mis en garde contre le fond commun de toutes les formes du nationalisme, dont le spectre s’invite dans nos existences partagées, toutes nations confondues : son racisme constitutif, ses nostalgies impériales et coloniales, ses hantises démographiques.

    Les valeurs qui ont fait l’Europe sont-elles encore porteuses d’une espérance suffisante pour contrer le retour d’une idéologie liée aux pages les plus sombres de son histoire ? » écrit-il.

    À lire et à écouter en ces temps troublés.

    Programmation musicale :

    Roxane Elfasci, Baptiste Erard, Théo Lampérier - Étude No9 (Arr. for 2 Guitars and Drums by Roxane Elfasci, Baptiste Erard, and Théo Lampérier). Compositeur : Philip Glass.

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    39 min
  • La revue Esprit analyse: «La convergence des haines»
    Aug 3 2025

    Le numéro d’été (juillet-août 2025) de la revue Esprit nous propose une plongée dans les ressorts idéologiques des mouvements autoritaires et d’extrême droite. Coordonné par Marc-Olivier Padis et Anne Dujin, la rédactrice en chef de la revue (notre invitée), le dossier intitulé «La convergence des haines» met en lumière une dynamique inquiétante : celle de la coalition des ressentiments. Anne Dujin et Marc-Olivier Padis en parlent au micro de Pierre-Edouard Deldique.

    Revue Esprit : La convergence des haines.

    Ce dossier complet se fonde sur les travaux de Daniel Lindenberg (Le Rappel à l’ordre, enquête sur les nouveaux réactionnaires, 2002), les auteurs montrent que les discours réactionnaires ne reposent pas sur une cohérence intellectuelle, mais sur une capacité à agréger des colères disparates. Qu’il s’agisse de rejet de l’autre, de nostalgie identitaire ou de frustration sociale, ces haines convergent dans un projet politique qui séduit par sa simplicité et sa radicalité.

    Le dossier analyse le rôle de plusieurs penseurs et écrivains dans cette recomposition idéologique :

    • Michel Onfray, présenté comme un vecteur de confusionnisme, mêle références de gauche et rhétorique conservatrice
    • Michel Houellebecq, quant à lui, incarne une posture post-politique, où le désenchantement devient esthétique
    • Charles Maurras, figure historique de la droite nationaliste, revient en force dans certains cercles intellectuels.

    Face à cette montée des discours illibéraux, les auteurs appellent à une réaction politique forte. Il ne suffit plus de dénoncer : il faut reconstruire un projet démocratique et émancipateur, capable de répondre aux peurs sans céder à la tentation autoritaire.

    La gauche en sera-t-elle capable ?

    Ce numéro du magazine Esprit dont la devise est « comprendre le monde qui vient » ne se contente pas d’un constat. Il propose une cartographie des pensées réactionnaires. Il invite à repenser les conditions d’un débat public éclairé.

    Dans un contexte où les passions l’emportent souvent sur la raison, cette enquête est une contribution précieuse à la défense de l’esprit critique.

    À écouter absolument.

    Site de la revue Esprit.

    Programmation musicale :

    Cinquième Saison - Cinquième Saison.

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    39 min
  • Samuel Fitoussi: «Méfiez-vous des intellectuels !»
    Jul 27 2025

    Dans son dernier livre, l’essayiste, observateur critique et amusé de son époque s’interroge avec pertinence sur le rôle des intellectuels et surtout sur leur lucidité. Il est l’invité de Pierre-Édouard Deldique dans un numéro estival du magazine IDÉES.

    Samuel Fitoussi est un essayiste français, diplômé de HEC et de l’Université de Cambridge, qui s’est imposé comme une voix singulière dans le paysage intellectuel contemporain. Chroniqueur au Figaro, il s’est fait remarquer par son ton incisif et son goût pour la controverse argumentée.

    Il est, sans nul doute, un des meilleurs observateurs du monde des idées en France aujourd’hui.

    Après Woke Fiction (2023), où il dénonçait l’influence de l’idéologie de la diversité dans les œuvres culturelles, il revient en 2025 avec un essai percutant : Pourquoi les intellectuels se trompent (Éditions de l’Observatoire) qui est au cœur de notre conversation cette semaine.

    Dans ce livre, Samuel Fitoussi explore les raisons pour lesquelles les intellectuels, malgré leur intelligence, adhèrent parfois à des idées absurdes ou nuisibles. Nourri par les pensées de George Orwell, Raymond Aron ou Jean-François Revel, il s’appuie sur des études en psychologie cognitive pour démontrer que l’intelligence ne protège pas de l’erreur — elle peut même y prédisposer.

    Programmation musicale :

    Gogo Penguin - Umbra

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    39 min